Solange
A Seat At The Table
- Columbia Records
- 2016
- 52 minutes
Solange est la jeune sœur de Beyoncé. Alors que sa frangine se spécialise dans une pop léchée et grand public, la cadette a tendance à créer des chansons beaucoup plus marginales et avant-gardistes. Sans révolutionner le R&B, l’Américaine fait tout de même dans un genre de néo-soul teinté de funk. Son précédent album, Sol-Angel And The Hadely St. Dreams date de 2008. Voici donc un bon huit ans que la jeune femme n’a pas fait paraître un long jeu en bonne et due forme. Les attentes étaient très élevées.
Solange ne déçoit pas avec A Seat At The Table et prouve qu’elle mérite une place parmi le groupe sélect d’artistes qui font un R&B audacieux tel que D’Angelo, James Blake et Frank Ocean. L’album est non seulement excellent et laisse une marque, mais il porte aussi un message qu’on a vu dernièrement dans les créations issues de la communauté noire états-unienne. Un message de revendication, qui sans avoir le poing en l’air, reste ferme et puissant. Un peu comme Kendrick Lamar, D’Angelo et sa sœur Beyoncé, elle s’inscrit dans une lignée d’artistes qui prêchent pour une émancipation des communautés vivant dans les ghettos et une égalité pour tous.
La création de cet album n’a pas été facile pour Knowles et elle a connu des épisodes de dépression. Cependant, le résultat est totalement réussi. Elle en ressort forte et en puissance. Une chanson comme Don’t Touch My Hair montre une belle confiance malgré la fragilité touchante qui est latente dans sa voix. F.U.B.U. est une chanson qui prône la force des individus de la communauté noire américaine; une ode à ceux qui s’élèvent au-dessus de la mêlée malgré les situations peu enviables dans lesquelles ils sont nés. On s’entend que ce n’est pas le cas des sœurs Knowles, mais elles se font porte-parole et prennent la défense de ceux qui n’ont pas une voix au chapitre.
Les difficultés émotionnelles qu’elle a rencontrées lors de la création d’A Seat At The Table se font aussi sentir dans des chansons telles que la mélodieuse Borderline (An Ode To Self Care) ou encore la magnifique Rise sur laquelle Majical Cloudz et Questlove ont prêté main-forte. Il n’y a pas de mauvaises pièces sur A Seat At The Table, mais certaines ressortent encore plus que d’autres. Dad Was Mad raconte les tensions entre certains noirs et les racistes du KKK qui créent de la colère puis, elle est suivit par la tripative et intoxicante Mad. En plus de Solange qui nous offre une superbe partition vocale, Lil Wayne y appose un rap franchement réussi et efficace. Scales, de son côté, fait appel à Kelela et c’est à la fois sensuel et émouvant.
A Seat At The Table est un excellent album sur lequel Knowles livre ses tripes de manière non convenue et intelligente. Elle prouve que musicalement, elle est prête à aller beaucoup plus loin que sa sœur. Elle démontre aussi sa capacité à laisser l’émotion infuser son interprétation. Un incontournable de l’automne.