Earl Sweatshirt
I Don’t Like Shit, I Don’t Go Outside
- Columbia Records
- 2015
- 30 minutes
Earl Sweatshirt est de retour avec son deuxième album, I Don’t Like Shit, I Don’t Go Outside. Vous vous imaginez qu’avec un titre pareil, on est loin des licornes et des maisons fabriquées en réglisses. Non, Sweatshirt n’est pas un grand optimiste dans sa poésie. Le successeur à l’excellent Doris continue-t-il d’approfondir son approche unique et sombre du hip-hop?
Totalement. Sweatshirt livre une vision mi-figue, mi-raisin de la réussite et des défis que cela entraîne. Ne croyez pas pour autant qu’il se plaint comme certaines vedettes de la musique pop. Ce serait mal connaître le jeune homme. Il fait plutôt un portrait déprimant de la réalité qui ramène à la surface une certaine lassitude de la vacuité de certaines personnes. Faucet, et son lent rythme, traduit à merveille cette situation: «And I don’t know who house to call home lately/I hope my phone break, let it ring/Toe to toe with the foes, new and old/Basic hoes try to cage him like the po’/When I run, don’t chase me».
Ce qu’I Don’t Like Shit, I Don’t Go Outside met en relief est le talent de sitedemo.caucteur du jeune Américain. Sur dix pièces, il est à la barre de neuf d’entre elles. Ce contrôle et la fusion, entre les trames et sa voix, participe à nous immerger efficacement dans son univers. The Mantra, et son rythme rapide et agressif, ou en tout cas, très énergique dans le cas de Sweatshirt, nous entraînent dans ses questionnements et frictions relationnels avec la gent féminine. Le portrait qu’il en brosse est limpide et poétique.
Huey qui ouvre la galette est un fier représentant de la clique Odd Future. Comme les autres membres, il se place dans la marge de la culture hip-hop américaine grand public. Alors que la consommation d’alcool et marijuana est normalement encensée, Sweatshirt en parle comme une perte de contrôle et un nuage qui se pose dans ses neurones.
Avec Doris, Earl Sweatshirt avait introduit sa parole honnête et quasi gênante par son authenticité. Cette fois, il le fait plus rapidement, l’album atteignant à peine les trente minutes, mais il le fait aussi avec une efficacité décuplée. Son rap «emo» réussit à peindre et traduire en mot des sentiments de manière poétique et limpide. Peu de poètes (tout court) ont ce talent. C’est un essentiel du rap de 2015.