Critiques

D-Track

Dieu est un Yankee

  • Coyote Records
  • 2019
  • 50 minutes
7,5
Depuis une quinzaine d’années, D-Track mène sa carrière. David Dufour – de son vrai nom – s’est fait d’abord connaître par ses talents de slameur, en participant à de multiples compétitions et événements de slam. Il a produit plusieurs albums de façon indépendante avant se joindre à l’étiquette Coyote Records. Cette alliance lui a vraisemblablement souri: son dernier album complet Message texte à Nelligan a même été nommé à l’ADISQ en 2016. Fort de toute cette expérience, le Gatinois d’origine lance Dieu est un Yankee, qui confirme son plus grand talent: la force de ses textes et sa capacité à bien les livrer.

Chez D-Track, il n’y a pas de grands effets de studio. Bien sûr, il y a des beats très efficaces qui tirent leur influence de plusieurs courants. Dans OK, certains bouts font penser un peu à la musique des vidéos 8-bit. Il y a une grosse présence jazz et soul sur plusieurs des pièces. L’apport soul le plus évident est sa collaboration avec Dominique Fils-Aimé, Jouer dehors, avec de grosses parties de trompette. La voix caractéristique de Fils-Aimé ressort aussi tout de suite. Fumeur occasionnel a elle aussi ses touches jazzées. L’hommage ultime à ce style culmine avec Mon père est un jazzman, où il se gâte avec de bons arrangements de cuivres.

D-Track s’est aussi adjoint plusieurs collaborations sur son album. Outre celle de Dominique Fils-Aimé, nommée plus haut, notons aussi les chansons Revenir sur terre et Airball, avec Koriass et Sam Faye, respectivement. Revenir sur terre a une belle touche originale, mais la musique et le thème m’ont beaucoup fait penser à Cinq à sept, la chanson de Koriass parue sur son dernier album: les excès de la fête et le retour à la réalité juste après.

Comme mentionné plus haut, la force de D-Track se retrouve dans ses textes, avec aussi dans de multiples clins d’oeil à la culture populaire. Dans Think Big, où il va parler de l’ambition d’être un bon rappeur, il va échantillonner à la fois Elvis Gratton et La guerre des tuques. De manière très habile, il jumelle la construction du méga château de neige avec les « deux gros garages » en ressortant le parallèle. Donne-moi Véro ne fait que référencer des personnalités connues en dénonçant dans son texte le culte du vedettariat. La chanson commence par un extrait de Jean Barbe qui se plaît de l’omniprésence de notre star-système québécois et de la volonté de plusieurs d’y accéder. Plusieurs lignes sont vraiment bien écrites et frappent l’imaginaire. Dufour va ainsi clamer que « [sa] télé est une galaxie » et qu’il « écoutai[t] Muzion pour leur art Dramatik ». Il conseille de « garder l’équilibre tout en gardant [son] pH » (dans Chimie chimie). Il y a une certaine critique sociale chez D-Track aussi. La chanson-titre critique les États-Unis, ce qui est toujours facile et de bon ton de faire. Airball va dans ce sens aussi, mais en exploitant la relation étrange de Kim Jong-un avec Donald Trump. Il y a des lignes très efficaces sur des shoots qui font référence tant au basketball qu’aux missiles nucléaires. Elle est pas mal plus efficace que Dieu est un Yankee, qui n’est pas mauvaise, mais qui en parle de façon plus convenue. En somme, c’est un très bon album qui confirme la richesse de l’imaginaire de D-Track.

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