Francos de Montréal 2022 ― Jour 5 : La Faune, La Traversée, Hubert Lenoir et Marie-Gold
C’est déjà la fin des Francos pour l’autrice de ces lignes. Retour sur les spectacles de La Faune, La Traversée, Hubert Lenoir et Marie-Gold
Les Francos sont honnêtement mon festival préféré. Il s’agit pour moi d’un safe space, d’un endroit où j’ai découvert des talents, où j’ai assisté à d’excellents spectacles et où je partage souvent mes moments préférés de l’été avec mes ami.es. Je signe présentement mon dernier compte-rendu de l’édition 2022, car je m’en vais au Festival de la chanson de Tadoussac. Je me suis donc gâtée avec une soirée bien remplie pour mon dernier soir des Francos 2022.
La Faune
Je dois l’avouer, je ne connaissais pas vraiment La Faune avant de me présenter devant la scène Hydro-Québec. J’avais écouté son plus récent extrait, Clandestin, paru il y a une semaine. C’est ce qui m’a donné le goût d’aller le découvrir. Jay Essiambre, le meneur du projet, a décidé de présenter majoritairement de nouvelles chansons. « Parce que c’est comme la relance de La Faune cette année », a-t-il expliqué entre deux chansons. « C’est vraiment touchant de vous avoir avec nous, la plupart des chansons sont de nouvelles pièces qu’on n’a jamais jouées avant », a-t-il ajouté.
Il faut souligner quand même que ça peut être un pari périlleux de présenter majoritairement de nouvelles chansons. Mais ça semble avoir été favorable à La Faune, puisque de plus en plus de gens se sont greffés au fil de la performance. La formation a d’ailleurs offert une performance très dynamique. Jay Essiambre, notamment, sautillait partout sur la scène, et ça donnait envie de faire de même. J’aimerais aussi faire une mention spéciale à Daniel Quirion aux claviers, qui, pendant une chanson, s’est lancé dans un solo de cloche à vache enlevant. Il n’y a pas grand-chose que j’aime plus que la cloche à vache (à part peut-être un bon solo de flûte traversière?) dans un spectacle. Les gens qui en jouent ont toujours l’air heureux, et ça me rend heureuse. Je suis une femme simple, que voulez-vous.
Photos par Charles-Antoine Marcotte:
La Traversée
La Traversée est un programme qui rassemble huit artistes (quatre Québécois, quatre Français) et qui leur permet de monter un spectacle. Cette année, le programme a permis à Ariane Roy, Amay Laoni, Pierre Guitard, Valence, UssaR, GATHA, T E R R I E R et Armelle Pioline de se rencontrer. Le tout s’est passé il y a un mois. La bande a présenté un premier spectacle à Paris. Ils étaient maintenant de notre côté de l’océan pour présenter le fruit de leur travail sur la grosse scène des Francos.
Ce spectacle marquait la fin de La Traversée. Malgré le contexte, il régnait une belle ambiance de fête. Chaque artiste a eu son moment pour briller, comme chacun a présenté une chanson de son cru. Pendant ce temps, les autres accompagnaient. Cela illustre d’ailleurs la polyvalence des musiciens : ils s’échangent les instruments, passant de la guitare aux percussions, au clavier et aux chœurs constamment. Le concept est intéressant et permet de découvrir de nouveaux artistes, d’autant plus qu’ils ont tous des styles différents.
Ils ont également profité de leur passage au Québec pour aller passer une semaine au Studio B-12. Les artistes se sont retrouvés en binôme de création. Les binômes allaient comme suit : Armelle Pioline et Ariane Roy, Pierre Guitard et UssaR, Amay Laoni et GATHA et finalement Valence et T E R R I E R. Ils ont présenté leurs nouvelles créations communes. On sentait l’esprit de franche camaraderie entre les huit artistes, surtout lors de la dernière chanson, soit Comme les autres de Pierre Guitard.
Hubert Lenoir
L’enfant terrible du Québec est de retour! Ce spectacle aux Francos était son premier spectacle officiel à Montréal, juste après que le FME lui ait proposé/imposé trois spectacles, dont un aux Foufs. « I’M BACK BABY », a lancé Hubert Lenoir rapidement dans la soirée, au grand plaisir de la foule massée en grand nombre sur la Place des Festivals. D’ailleurs, Hubert Lenoir avait de l’énergie à revendre ce soir! Après tout, il est reconnu pour ses performances enlevantes. Celle aux Francos s’inscrit dans la même lignée. Pour l’avoir vu à Santa Teresa également, on peut dire que le spectacle concocté par Lenoir est un beau bordel organisé, dont il est le maître.
En 2018, le Journal de Québec a fait un sondage qui déterminait quelles personnalités ont marqué le Québec positivement ou négativement. Dans la catégorie « impact négatif », on retrouvait Hubert Lenoir à la 8e position entre Alexandre Bissonnette (l’auteur de la tuerie de la Mosquée de Québec) (7e) et Martine Ouellet (ancienne chef de Bloc québécois) (9e). Il en a parlé dans son spectacle, en lançant un « Look at me now! » à la foule rassemblée, qui l’a chaudement acclamé. À l’époque, s’est-il rappelé, il recevait des menaces de mort homophobes constamment. C’était une période particulièrement difficile pour lui. Il s’est ensuite lancé dans un très beau message de résilience et d’acceptation de soi, bien senti et plutôt touchant.
À l’instar de La Traversée deux heures plus tôt sur la même scène, tout le groupe a son temps pour briller pendant le spectacle. Que ce soit les choristes bien mises en valeur par Lenoir, le batteur avec une reprise métal de Le temps des cathédrales ou même celui qui s’occupe du son qui a le droit de pousser la chansonnette, tout le monde a eu son moment. Le seul hic de cette performance que j’aimerais souligner est les jeux de caméra. J’apprécie vraiment la démarche de Noémie D. Leclerc, qui, caméra à la main, le suit sur scène alors que les images sont transmises en temps réel sur des écrans géants. J’aime vraiment l’idée, je trouve que ça correspond à l’esthétique de Lenoir.
Cependant, je ne sais pas ce qui s’est passé ce soir, mais souvent, ce qu’on voyait à l’écran ressemblait à des images filmées par une caméra échappée. Les images coupaient également souvent et sautaient d’un point de vue à l’autre. Si je peux apprécier les effets, je dois quand même souligner que certaines personnes ne réussissent à voir ce qui se passe sur la scène que grâce à ce qu’on voit sur les écrans géants. Les gens de petite taille, comme moi (je mesure 5’3), se retrouvaient à voir des images confuses, qui bougeaient rapidement. Peut-être est-ce moi qui suis de mauvaise foi, mais ça m’a agacée.
Photos par Alexanne Brisson
Marie-Gold
Marie-Gold s’est présentée sur la scène Desjardins avec toute son attitude. Elle a souhaité la bienvenue à la foule nombreuse dans la ville de son dernier album, Bienvenue à Baveuse City. Elle était énergique et la foule la suivait clairement. Par exemple, lorsqu’elle a demandé à la foule de faire un mosh pit sur sa chanson Beach Club, cette dernière l’a écoutée avec plaisir. La rappeuse a également montré l’étendue de son talent dans un freestyle supporté uniquement par les tapements de main du public. C’était impressionnant. Elle a également offert deux de ses 63 disstracks, au grand plaisir des gens rassemblés.
La rappeuse a fait appel aussi à quelques artistes invités. Par exemple, pour la pièce Goélands, sorti le vendredi 13 mars 2020 a-t-elle tenu à souligner, Kirouac et Lydia Képinski, que l’on retrouve sur la version originale, sont venus la rejoindre. La complicité entre Képinski et la rappeuse est vraiment belle à voir : à la toute fin de la pièce, l’autrice-compositrice-interprète a soulevé dans ses bras la nouvelle diplômée en ingénierie. On sentait toute la fierté et l’admiration dans son geste. C’Nee, que l’on retrouve sur son dernier album, a également été invitée à prendre part à la fête. Malheureusement, cela ne s’est pas aussi bien passé que prévu.
Dans un interlude, Marie-Gold a expliqué que dans sa ville, on ne roule qu’en voiture électrique. Malheureusement, comme elle n’a pas de permis, elle a demandé si quelqu’un pouvait lui offrir un lift. La foule a répondu à sa demande, mais ce n’était apparemment pas ce à quoi elle s’attendait, car elle a répété sa question. Elle est ensuite allée sur le côté de la scène pour chercher son invitée, qui n’arrivait pas. Elle a fait une blague sur le possible manque de batteries de ladite voiture électrique et a donc demandé à la foule de l’aider à appeler C’Nee. Cette dernière est finalement apparue alors que Marie-Gold s’apprêtait à commencer la chanson seule. Malgré ce délai, la rappeuse n’a jamais semblé paniquer. Elle est restée en contrôle tout au long.
Un autre petit bémol à cette performance plutôt bonne de l’ancienne de Bad Nylon : ce n’était pas toujours impeccable au niveau de la synchronicité. Parfois, les enregistrements jouaient en arrière-plan, et on entendait un décalage entre ce qui se disait sur scène et sur l’enregistrement. Par exemple, Interlude : La Bavette en est un bon exemple. Ce qui se retrouve sur l’album jouait en même temps qu’un homme qui rendait le texte en direct, parfois avec un certain décalage. Il aurait été mieux de choisir entre l’un ou l’autre. Mais somme toute, c’est quelque chose de pardonnable. Elle a donné tout un spectacle, qui s’est terminé par une reprise francisée (comme on est aux Francos) de Bad Reputation de Joan Jett. Disons simplement que Chloé Pilon-Vaillancourt a une très jolie voix et que j’espère l’entendre plus souvent.
Photos par Alexanne Brisson: