Critiques

Noémie Kaiser

L’or des fous

  • Indépendant
  • 2023
  • 27 minutes
8
Le meilleur de lca

Noémie Kaiser, que l’on a connue en tant que chanteuse principale du collectif féminin Times New Woman, plonge dans l’aventure solo. Elle présentait son premier album, L’or des fous, en février 2023. Pour ce premier effort, l’autrice-compositrice-interprète s’est entourée de Olivia Khoury, Allison Arius et Alice Éthier aux chœurs, Alexander Ravvin aux guitares, François Jalbert au lapsteel, guitares, réalisation et prise de son, Catherine Lemay-Pereira au piano et aux synthétiseurs, Laurent Perrault-Jolicoeur à la contrebasse et à la basse électrique, Jules Payette à la batterie, Veronica Thomas, Céline Arcand et Mélanie Bélair aux violons, Jean René au violon alto et Sheila Hannigan au violoncelle. Tout ce beau monde a su créer un album sensible, aux ambiances riches et à la poésie sentie. Le tout est porté par la voix particulière de Noémie Kaiser.

L’opus commence avec la magnifique C’était pour de faux. Dès l’ouverture, la musicienne vient à la rencontre de l’auditeur vocalement. Sa voix est ensuite enrobée dans une ambiance musicale douce, qui vient donner le ton. On y retrouve un petit côté qui peut rappeler la chanson La plus belle des maisons de Pierre Lapointe, la version sur l’album Pour déjouer l’ennui. Le morceau reste lumineux et léger, malgré le sujet qui est plutôt mélancolique.

S’envole une pensée
Vers une dimension parallèle où ton rire résonne toujours dans mes oreilles
Qui va m’habiter?
Toutes tes plus grandes peurs elles ont quitté mon corps devenu planète abandonnée
Perdue dans l’air du temps

C’était pour de faux

Ce côté mélancolique de L’or des fous s’explique par le fait que Noémie Kaiser s’inspire d’expériences vécues pour écrire. « À cause de mon penchant pour la mélancolie, c’est souvent quand je vis des expériences difficiles que ça déborde jusqu’à la musique », explique-t-elle par voie de communiqué. En entrevue avec Louis-Philippe Labrèche à Plaque Tournante, elle ajoute : « Tout est super personnel, c’est un peu le sentiment d’ouvrir son journal intime à la terre entière. »

Une pièce comme T’es venu au monde, ça veut pas dire que tu vis dedans en est un bon exemple. Noémie Kaiser y traite de la maladie mentale ainsi que la volonté d’aider avec douceur. Ces sentiments, qui touchent bien des gens, sont développés de manière très poétique. À la fin, pendant près d’une minute trente, on a l’impression qu’il y a deux personnages dans la pièce : la guitare électrique et la voix de la musicienne. La première souffre de son côté et semble appeler à l’aide. Au début, elle souffre seule. Puis, la voix de Noémie Kaiser réapparaît dans des chœurs réconfortants. Pendant quelques secondes, les deux coexistent, comme si Kaiser tentait d’apaiser son ami avec sa voix. Puis, tout redevient calme. La tempête est passée.

Bien qu’elle s’inspire d’elle-même et du monde qui l’entoure pour écrire, Noémie Kaiser réussit à enrober le tout dans une poésie qui permet à tous d’y trouver sa propre interprétation. Si le texte d’Un jour on est devenus trop grands pour ça est plus frontal, chacun pourra y imaginer son enfance. L’autrice-compositrice-interprète aborde le sentiment de vieillir soudainement. Le tout y est abordé de manière naïve, en prenant appui sur des souvenirs de l’enfance. Les arrangements de cordes, qui font leur apparition dès le deuxième couplet, peuvent rappeler Notre-Dame-des-Sept-Douleurs de Klô Pelgag, sans que ce soit dérangeant.  

On volait si haut dans le ciel en criant comme des oiseaux
Plombait sur nous le soleil que l’on buvait comme de l’eau
On creusait loin dans la terre pour voir ce qu’il y a au centre
Affrontant monstres et marées des fourmis plein les jambes
On avait pas à s’cacher que tu as besoin de moi
Comme j’ai besoin de toi, nos yeux avaient pas trop froids  

Un jour on est devenus trop grands pour ça

Bref, L’or des fous est comme un excellent livre : on a toujours hâte à la prochaine plage pour voir où l’autrice-compositrice-interprète va nous amener. Un premier effort fort réussi pour Noémie Kaiser!

Crédit photo: Pochette: Laurence Lemieux; photo intégrée à la pochette: Philippe Brochu-Pelletier