Critiques

Les filles de Illighadad

At Pioneer Works

  • Sahel Sounds
  • 2021
  • 46 minutes
8
Le meilleur de lca

La formation Les filles de Illighadad nous offrent un troisième album intitulé At Pioneer Works, où elles reprennent quelques pièces de leur répertoire tout en y ajoutant des nouvelles chansons. Cet album a été enregistré en 2019 lors d’un spectacle à Brooklyn. Illghadad, c’est quoi? C’est un petit village en bordure du Sahara, dans le Niger. Non seulement Illghagad est la région d’origine des membres du groupe, c’est aussi l’essence même de la musique qu’elles créent.

Fondé en 2016, par Fatou Seidi Ghali, l’une des premières femmes de sa région à jouer de la guitare professionnellement, et par la chanteuse Alamnou Akrouni, le groupe préserve les traditions de leur village natal grâce à leur musique blues touareg, où le chant choral vient se mêler à la « desert guitar ». En 2017 s’ajoute Amaria Hamadalher, une autre pionnière de la guitare dans sa région, cette fois originaire de Goufat, un petit village près d’Agadez, au Niger. Elles sont accompagnées par le guitariste Abdoulaye Madassane, qui se trouve être le cousin de Fatou.

Contrairement aux autres artistes de musique touarègue de leur époque, Les filles de Illighadad n’incorporent pas le rock à leur musique, mais cherchent plutôt à célébrer les rythmes ancestraux du Tendé, un instrument habituellement réservé aux femmes. Les traditions s’arrêtent pourtant au moment où l’on voit des femmes jouer de la guitare. Ce qui en choque peut-être quelques-uns, mais qui en inspire aussi beaucoup.

Comme les précédents albums étaient enregistrés en studio, on misait sur le mixage pour faire éclore les subtilités des jeux de guitares, de la douceur des voix féminines et des rythmes minimalistes. L’écoute était peut-être plus accessible pour des oreilles habituées aux sons aseptisés des radios commerciales. Pour At Pioneer Works, on se transporte complètement dans une performance aux rythmes bruts, complexes et envoûtants qui s’enchaînent de sorte à créer un effet incroyablement hypnotique. Les titres, qui durent en moyenne 8 minutes, prennent leur temps à s’installer, mais font naître une série de boucles mélodiques dont le rythme semble indestructible.

Leurs voix fortes et inclassables ouvrent une brèche dans leur village en nous livrant une poésie simple et narrative, où l’amour, l’amitié, la communauté et la médiation sont au cœur des préoccupations. La magie se crée probablement grâce à l’enregistrement devant public, puisque la musique touarègue est une musique de guérison et que son effet ne peut qu’être redoublé lorsqu’elle se joue collectivement.

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