Critiques

Deerhunter

Why Hasn’t Everything Already Disappeared ?

  • 4AD
  • 2019
  • 36 minutes
7,5

Depuis 2005, Deerhunter nous offre avec constance des disques plus que pertinents.  Menée par le talentueux Bradford Cox, Deerhunter est l’une des plus importantes formations américaines des années 2000, tous genres confondus. C’est avec la sortie d’Halcyon Digest (2010) que le groupe a séduit un public plus large. Paru en 2013, l’abrasif Monomania est tout aussi excellent.

Toutefois, c’est avec la parution de Fading Frontier (2015) que le quintette a délaissé ses assauts sonores si grisants pour entreprendre un virage pop assumé, et disons-le totalement réussi. C’est aujourd’hui même que le quintette revient avec une nouvelle création intitulée Why Hasn’t Everything Already Disappeared ? Commencer une nouvelle année avec un album de Deerhunter a de quoi faire sourire l’amateur de rock le plus renfrogné.

Coréalisé avec l’aide de l’auteure-compositrice-interprète Cate Lebon et l’ami Ben H. Allen – l’homme derrière la console pour Halcyon Digest et Fading FrontierDeerhunter creuse plus profondément le sillon pop amorcé sur le précédent effort, mais en gardant intact le profil aventureux de sa musique. Un disque parfaitement en équilibre entre « prise de risque » et accessibilité.

Derrière les splendides arrangements prodigués tout au long de l’album (clavecins, synthés aériens, etc.) se cache une mélancolie sentie, potentiellement engendrée par cette atmosphère de « fin du monde imminente » ressentie en Occident. La pop psychédélique des années 60 côtoie le rock alterno et l’électro-pop des années 80 avec une fluidité qui force l’admiration. Why Hasn’t Everything Already Disappeared ? est un album aussi réconfortant que déluré… et dans un univers rock souvent répétitif et aseptisé, l’inventivité pop de Deerhunter fait plaisir à entendre.

Et cette réussite n’est pas étrangère au talent de songwriter de Bradford Cox. Même si la réalisation peut porter ombrage aux thèmes abordés par l’auteur (disparition de la culture et de l’humanisme, importance démesurée du marketing, appât du gain, etc.), c’est ce décalage qui permet à l’auditeur de souffler, qui lui donne envie de renouveler l’écoute.

Death in Midsummer, No One’s Sleeping (du Deerhunter pur jus), Element et What Happens To People ? pourraient tous devenir les références pop ultimes dans le répertoire du groupe. Les intermèdes Greenpoint Gothic et Détournement (en français s.v.p) sont réussies et servent d’habiles transitions vers de nouvelles ambiances… particulièrement Détournement qui escorte l’auditeur vers une conclusion plus brumeuse avec les pièces Futurism, Tarnung, Plains et Nocturne.

Bradford Cox souhaitait créer « un album de science-fiction bien ancré dans le présent ». Eh bien, c’est exactement ce à quoi l’auditeur a droit en écoutant Why Hasn’t Everything Already Disappeared ?

Même si on les préfère en mode décapant, Deerhunter est l’un des rares groupes rock à avoir réussi son virage pop avec autant d’adéquation. Un disque parfaitement intemporel.

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