Teezo TouchDown, Vince Staples, Kali Uchis et Tyler, the Creator à la Place Bell le 9 mars 2022
Devant une Place Bell presque pleine à rabord, Tyler, the Creator et ses amis ont offert un spectacle impressionnant.
Photos par Jordan Sully
Avant que les premières notes soient jouées, une panne de courant à Laval a fait craindre le pire pour le concert. Heureusement, les équipes d’Hydro-Québec ont réussi à rebrancher la Place Bell à temps pour que les artistes puissent prendre la scène dans les délais prévus. J’ai ressenti presque un peu de nostalgie à voir la foule qui s’amassait aux portes de l’aréna de l’île Jésus. Après deux ans de pandémie, ça donnait un sentiment de vie qui reprend.
Teezo TouchDown
Le rappeur du Texas, Teezo TouchDown est un drôle de numéro. Celui qui affectionne particulièrement la forme théâtrale a offert une performance très divertissante quoiqu’anecdotique au niveau musical. On se retrouve devant un artiste qui a une proposition impressionnante, presque plus grande que nature. Avec ses cheveux métalliques, son chandail qui lisait : « Heavy Metal Only » et sa prestation énergique, c’était un personnage d’intérêt. Le hic, c’est que musicalement, c’est plutôt faible. C’est un peu dans la même veine que bien des rappeurs américains qui ont été marqués par la génération de Soundcloud Rap et qui tentent de reproduire un mouvement qui est déjà une histoire qui appartient au passé.
Vince Staples
Les choses ont viré de bord à 180 degrés avec Vince Staples qui a offert une solide performance de rap agile et mélodieux. Littéralement, celui-ci s’est installé sur une scène placée sur le parterre vers l’arrière. Le Californien était en pleine possession de ses moyens pendant qu’il livrait des pièces de la plupart de ses albums avec une grosse emphase sur son album homonyme paru en 2021. Il a gardé le meilleur pour la fin en enfilant 745, LAW OF AVERAGES, Big Fish et Norf Norf. C’était impressionnant de le voir enligné les lignes avec un aplomb et un flow impeccable. De plus, il semblait avoir beaucoup de plaisir avec la foule et a même déclaré que c’était « le meilleur spectacle de cette tournée. » Belles paroles d’un charmeur ou réalité? Je préfère penser que Montréal est une ville incroyable où jouer.
Kali Uchis
Kali Uchis a ensuite pris la scène, attaché à un poteau à l’arrière-scène avant que ses trois danseuses viennent la libérer de ses chaînes. Elle a débuté avec une valeur sûre, Dead to Me, tirée de son album Isolation. Elle a enchaîné avec la pièce 10% qui se retrouve sur l’album BUBBA de Kaytranada. Elle a enchaîné les pièces avec un chant souvent trafiqué avec des filtres divers, mais toujours sur la note avec un bon aplomb. Elle a fait quelques pièces de son album plus récent, Sin miedo (del amor y otros demonios) ∞, un album comme vous le devinez : en espagnol.
Tout au long du concert, ses danseuses ont pris peu de pauses, enchaînant les chorégraphies avec habiletés et précisions. Du côté de la présence scénique, par contre, Kali Uchis n’avait pas l’air particulièrement confortable. Ses gestes étaient approximatifs et elle n’avait pas l’air particulièrement confortable dans son accoutrement de scène. En comparaison, ses trois danseuses étaient tout feu tout flamme. C’est dommage parce que lors de son passage à Montréal dans le cadre d’Osheaga en 2018, tout l’effet sexy était là, mais elle avait l’air drôlement plus à l’aise sur scène. Bref, son inconfort a miné la qualité de la prestation. C’était tout de même un moment agréable!
Tyler, the Creator
Tyler, the Creator est arrivé en rappant dans une vieille Royce-Rolls sortant du plancher devant un manoir sur les mots de DJ Drama : « I don’t think they’re ready for this. » En effet, on n’était pas prêt au feu roulant qui a suivi. Tyler, the Creator a tout laissé sur scène en enchaînant les pièces avec aplomb, agilité et une bonne voix chantée. Il a même fini Earfquake a capella en prouvant à quel point il maîtrisait maintenant le côté chanté. Mais avant de ce rendre là, il nous a livré tout un spectacle. La pyrotechnie a fusé de toute part dès la deuxième chanson. Ce qui est beau avec la popularité qu’il a acquise au cours des années, c’est que ça lui permet d’aller au bout de ses rêves fantasques sur scène. Ça marche.
Le côté un peu baveux et humoristique de Tyler, the Creator est peut-être un peu plus poli qu’à l’époque, mais il reste aiguisé. Il l’a prouvé en s’adressant très tôt dans le concert à ceux qui étaient les moins bien placés dans les estrades tout en remerciant la foule d’être venue au concert. Comme on venait tout juste de passer sa fête, il est né le 6 mars 1991, il a demandé aux gens de faire quelque chose de spécial qui ne lui arrive presque jamais : se faire huer. Et donc à plusieurs reprises, de connivence avec le Californien, la foule l’a conspué d’amour.
La mise en scène était élaborée et comportait un bateau qui le transportait de la scène principale où il y a un manoir à une « île » avec de l’herbe. Chaque élément est réfléchi et placé, mais Tyler, the Creator réussit à se les réapproprier et nous faire croire à la magie de la « première fois ». Rajoutez à tout ça une bonne dose de feu pendant Who Dat Boy avec une ombre d’A$AP Rocky qui rap dans les fenêtres du manoir et vous avez tout un spectacle pour les yeux.
Ce l’était aussi pour les oreilles avec des succès comme 911, Yonkers, Bimmer, Boredom, WUSYANAME, CORSO, LUMBERJACK et Tamale. Navigant à travers sa discographie, il a prouvé qu’il est l’un des meilleurs dans le rap contemporain, malgré son approche audacieuse. Il a terminé avec une suite de solide pièce pour atteindre le climax avec NEW MAGIC WAND et RUNITUP.
C’était une très belle soirée à Laval avec Teezo TouchDown, Vince Staples, Kali Uchis et Tyler, the Creator.
Crédit photo: Jordan Sully