Fatoumata Diawara au Théâtre Beanfield le 30 mars 2024
Le Théâtre Beanfield a été hier soir le lieu d’une rencontre magistrale entre la musique traditionnelle africaine et le rock moderne, portée sur scène par une artiste charismatique et engagée en la personne de Fatoumata Diawara.
L’autrice-compositrice-interprète malienne, également comédienne et activiste, était de passage à Montréal pour présenter les morceaux de son plus récent album London Ko, paru au printemps 2023.
Dès son entrée sur scène, Fatoumata Diawara, impériale, vêtue d’un magnifique et coloré boubou africain sur lequel sa brillante guitare électrique créait un contraste saisissant, impose le respect. Son charisme magnétique attire immédiatement l’attention. Pendant pas moins de deux heures de concert, la musicienne tient le public ensorcelé.
La présence scénique de l’artiste, très théâtrale (elle est aussi comédienne après tout), transcende les barrières linguistiques et culturelles. Même en ne comprenant pas ses mots en bambara, une des langues du Mali, sa voix et son charisme suffisent à ce qu’on reste pendu à ses lèvres. La combinaison de solos de guitare endiablés et de rythmes africains traditionnels fusionnés avec des éléments de rock, de folk et de funk contemporain crée un tourbillon musical qui transporte le public dans un réjouissant voyage sensoriel.
Au fur et à mesure que le spectacle progresse, l’énergie de Fatoumata Diawara semble croître exponentiellement. Elle s’éclate de plus en plus sur scène, sa performance d’abord plus posée devient en fin de parcours complètement excentrique, marquée par d’envoutantes danses et de surprenants changements de costumes. Chacun de ses mouvements est empreint d’une passion palpable, transmettant une joie contagieuse à l’ensemble de la salle.
L’expérience est à la fois enivrante et édifiante. Bien que ses discours au public soient rares, chaque intervention est pertinente et porteuse de sens. Elle aborde des thèmes importants tels que le féminisme et l’appel à la paix. Dans une prise de parole particulièrement puissante, elle évoque courageusement son propre vécu, celui de son expérience de l’excision à l’âge de 10 ans, pour appeler à la fin immédiate de cette pratique de mutilation génitale des jeunes filles, malheureusement encore répandue. Cette ouverture sur un sujet sensible et souvent tabou démontre éloquemment son engagement envers le changement social et son désir de sensibiliser le public.
Un aspect notable de sa performance à Montréal est son adresse à l’auditoire en français, ce qui est particulièrement apprécié au cours du segment nord-américain de sa tournée mondiale, où elle se produit la plupart du temps dans des villes anglophones. Une attention portée à la diversité linguistique de son public qui témoigne de sa volonté de créer un lien authentique avec le spectateur.
En bref, la capacité de l’artiste malienne à mêler prestation musicale enflammée et réflexions profondes sur des questions sociétales cruciales a fait de cette soirée sur la rue Notre-Dame une expérience inoubliable, nourrissant à la fois le corps, l’âme et l’esprit.
Crédit photo: evenko