Taylor Swift
Folklore
- Republic Records
- 2020
- 63 minutes
L’excitation était à son paroxysme alors que le jeudi 23 juillet dernier, Taylor Swift nous a fait le coup de l’album-surprise. Son nouvel album intitulé Folklore est né à minuit ce jour-là. Il a été conçu avec Aaron Dessner du groupe The National ainsi que Bon Iver avec lequel elle signe un duo. C’est très loin de ce que l’autrice-compositrice-interprète américaine nous a offert avec ses deux derniers albums pop radiophoniques plutôt convenus et qui surfaient sur la vague de 1989.
Avec le confinement et la crise sanitaire qui entoure la pandémie de la COVID-19, Swift s’est retrouvé avec quelque chose qu’elle n’avait jamais eu avant : du temps libre! En se demandant ce qu’elle avait envie de faire, elle a contacté Aaron Dessner, un de ses musiciens préférés, pour lui demander de participer à la création de Folklore. Et bien sûr, elle a fait appel à son fidèle collaborateur : Jack Antonoff.
Ce qui frappe à l’écoute de Folklore est la différence radicale de son par rapport au reste de l’œuvre de Swift. Oubliez les paillettes et les effets de grandeur; l’album est intime et pour la première fois depuis longtemps on entend toute la chaleur de la voix de Swift. La même chaleur que lorsqu’elle avait fait sa performance pour NPR’s Tiny Desk Concerts. Elle possède l’une des plus belles voix de la musique pop et elle l’utilise ici à bon escient.
Le changement de ton frappe parfois dans le mile sur les pièces les plus pop comme seven, august ou encore the 1 qui lance l’album avec aplomb. Et cette pop sentie lui va très bien. En enlevant du fla-fla, on retrouve une humaine émouvante qui sait toucher le cœur avec son interprétation juste.
À d’autres moments, on a l’impression d’avoir affaire à une Lana Del Rey vanille. Le premier simple cardigan est presque gênant. On dirait une reprise d’une chanson issue de Norman Fucking Rockwell. Est-ce que cette similitude est liée au fait que les deux artistes ont travaillé avec Jack Antonoff? Difficile à dire puisque cardigan a été écrite et composée en grande partie par Dessner. La même similitude étrange est de nouveau présente dans my tears ricochet. Les maniérismes vocaux sont les mêmes avec les fins de mots qui s’étirent langoureusement et les reprises de souffle typique de Del Rey.
L’autre point faible de Folklore est sa durée. C’était aussi le cas pour Lover et Reputation. Swift semble avoir de la misère à s’arrêter dans la création. Le problème, c’est qu’à un moment donné le ton plutôt uniforme de l’album finit par alourdir l’écoute. Peut-être qu’une sélection de 12 chansons et un EP lancé plus tard avec les 4 titres restant auraient aidé l’ensemble des chansons à briller.
Généralement, les textes sont intéressants. Swift a une plume plus que capable. Et surtout, elle a voulu briser l’image de perfection qu’elle a construite autour d’elle-même. betty est un bel exemple alors que Taylor Swift utilise un gros mot:
But if I just showed up at your party
Would you have me? Would you want me?
Would you tell me to go fuck myself
Or lead me to the garden?
In the garden, would you trust me
If I told you it was just a summer thing?
I’m only seventeen, I don’t know anything
But I know I miss you— Betty
Mais cette envie de se « dévergondir » prend une tournure ridicule et comique sur mad woman. Swift veut dire ceci : « Does she smile? / Or does she mouth, « Fuck you forever »? » Le truc, c’est que des guillemets, ça se transpose très mal en chant. Ce qui donne un sens complètement différent à la phrase. C’est attendrissant, mais ô combien drôle. Disons-le aussi, ça repositionne Taylor Swift sur un plan plus humain.
Dans l’ensemble, c’est une aventure réussie pour Taylor Swift qui offre un bon album d’indie folk rock pop à l’image de ce qu’elle voulait créer. Malgré les quelques maladresses et la longueur inutile, ça s’écoute plutôt bien.