Critiques

Björk

Utopia

  • One Little Indian Records
  • 2017
  • 72 minutes
8
Le meilleur de lca

Björk lance son dixième album en carrière. Après Biophilia, la chanteuse islandaise a pris une pause de 4 ans. Avant qu’elle fracasse le tout à grand coup de séparation difficile. Björk s’est présentée vulnérable avec un cœur brisé. Vulnicura était noir et empreint d’une certaine amertume par rapport à l’amour. Sur Utopia, c’est tout le contraire. Comme le nom l’indique, Björk se permet de rêver de nouveau. Elle regarde le futur et le présent avec espoir. Par contre, tout n’est pas que ballons et confettis au monde du célibat. Elle a qualifié Utopia de son album « Tinder ».

Si Utopia réfléchit à la fragile relation qui s’installe entre deux humains qui se plaisent et apprennent à se connaître, il est aussi marqué par une relation puissante et stable. On retrouve de nouveau Arca à la réalisation et la composition de plusieurs pièces. Björk a trouvé chez Arca un créateur qui explore un univers sonore qui lui convient. La rencontre fonctionne encore une fois. The Gate, premier extrait à paraître d’Utopia, le démontre éloquemment.

When I hear someone
With same accent as yours
Asking directions
With the same beard as yours
I literally think I am five minutes away from love
Features Creatures

Dans Features Creatures Björk explore cette manie de rechercher ce qui par le passé nous a fait tomber pour quelqu’un. Elle y va de banalités anecdotiques comme quelqu’un qui porte un barbe semblable ou qui magasine au même disquaire. Cet aveu candide d’un moment où l’on cherche l’amour partout. La soif prenant le dessus sur la raison comme un alcoolique qui cherche dans chaque fond de bouteilles pour une ultime gorgée et vit dans l’espoir à chaque bouteille croisée.

Blissing Me fait aussi preuve d’une honnêteté déconcertante. Nous suivons le raisonnement de Björk qui se rend compte qu’elle n’est pas tombée en amour avec la personne, mais bien avec l’amour en soi. En débutant par un échange de musique, elle plonge à travers cette relation qui n’en devient jamais une. Björk semble en avoir encore beaucoup sur le cœur quand même. Vulnicura ne semble pas avoir expié tout le fiel qui l’habitait. Sur Tabula Rasa, malgré les flûtes traversières douces et enchanteresses, le propos est dur et violent :

Clean plate :
Tabula rasa for my children
Let’s clean up
Break the chain of the fuck-ups of the fathers
It is time :
For us women to rise, and not just take it lying down
It is time :
The world, it is listening

Oh how I love you
Embarrassed to pass this mess over to you
But he led two lives
Thought ours was the only ones
Tabula Rasa

C’est dur et en même temps, empreint d’une détermination de fer. Lorsque Björk de son album de « dating », elle réussit à bien exprimer ce genre de malaise où l’on rencontre de nouvelles personnes sans toutefois pouvoir s’affranchir d’un passé trop frais et encore trop présent. Elle fait preuve d’une grande humanité et continue à se faire aventureuse musicalement. Le principal défaut étant que ses mélodies semblent parfois se perdre dans les airs et ne pas aboutir. Mais à partir du moment où l’on accepte de s’y laisser porter, Björk nous guide de sa voix caractéristique et unique.

C’est une douce utopie que nous présente Björk sur son nouvel album. Utopia n’est pas seulement fait de lumière, il compte aussi des zones ombragées où les sentiments ne sont pas clairs ni définis. C’est un album fort réussi qui rassure après les sombres jours de Vulnicura. Ce n’est pas pour autant une œuvre facile à digérer et ça prend de nombreuses écoutes pour vraiment y plonger.

Ma note: 8/10

Björk
Utopia
One Little Indian
72 minutes

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