Critiques

Arca

Mutant

  • Mute Records
  • 2015
  • 62 minutes
8
Le meilleur de lca

ArcaLe Vénézuélien d’origine, Alejandro Ghersi, mieux connu sous le nom d’Arca, a fait énormément de chemin en quelques années. Quand il a quitté le quartier cossu de Caracas de son enfance pour aller étudier la musique à l’étranger, Ghersi ne pouvait certainement pas s’imaginer qu’il était à quelques années d’être étroitement associé au travail de grosses pointures comme Kanye West et Björk, et de stars en ascension comme FKA Twigs.

En parallèle à ces collaborations de haut niveau, Arca travaille à des projets solos ambitieux et de haute qualité. Depuis ses premiers mini-albums, sa musique dégage une étrange sensualité synthétique qui le place dans le voisinage du R&B alternatif, mais qui utilise un vocabulaire stylistique extrêmement vaste, allant de l’IDM abstraite d’Autechre à la musique de chambre soignée et délibérée de type Beethoven ou Philip Glass. Ces références peuvent sembler lourdes, voire impossibles à porter, mais Arca y arrive de façon convaincante, du moins quand il ne se perd pas dans un concept trop hermétique.

Plus tôt cette année, Ghersi avait présenté le montage sonore Sheep, une commande pour un défilé du collectif de mode Hood by Air. Le ton de cette composition était particulièrement assuré et irrévérencieux, moins attaché qu’auparavant à ses influences et à ses prédécesseurs. Ce que Mutant nous offre au cours de ses soixante-deux minutes, c’est le large éventail de ce qu’Arca sait faire, tant sa récente assurance que le travail d’orfèvre auquel il nous a habitués. Parfois intensément rythmées, parfois ancrées sur des boucles asymétriques qui tiennent à peine debout, parfois délicatement et mélodiquement assemblées, parfois à la limite de la cacophonie, les compositions d’Arca sont remarquablement variées, mais maintiennent une unité de ton grâce aux timbres qu’il choisit.

L’aspect visuel n’est pas négligé non plus dans l’œuvre d’Arca, grâce principalement à sa collaboration constante avec l’artiste visuel Jesse Kanda (qui est aussi son chum, ça aide). Les images des pochettes de ses albums tout comme ses vidéoclips reflètent bien sa musique, étrangement organique et sexuelle, mais technologiquement déformée au point d’en devenir carrément grotesque. Le couple a d’ailleurs poussé le bouchon un peu loin avec le vidéoclip de la pièce Front Load, qui a dû être retiré de YouTube pour son caractère trop explicite.

Ce ne sont donc pas les raisons qui manquent pour qu’Arca fasse parler de lui, et malgré toute cette attention, le jeune musicien n’a encore rien fait pour décevoir. Mutant est une belle et longue excursion dans son univers. Si elle nous laisse parfois sans point de référence clair, elle n’en est pas moins constamment fascinante.

Ma note: 8/10

Arca
Mutant
Mute Records
62 minutes

http://www.arca1000000.com/

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