Critiques

TRZTN

Royal Dagger Ballet

  • Octopus Hotdog
  • 2021
  • 34 minutes
7,5

TRZTN est le nouveau projet de musique électronique de Tristan Bechet, compositeur d’origine portugaise qui travaille depuis quelques années sur des trames sonores de publicités, films et jeux vidéo souvent produites par Cadence Films. On s’en doute, Bechet a développé un sens de l’atmosphère qui réussit aisément à nous transporter, et c’est à partir de ce modèle qu’il a collaboré avec des chanteurs et chanteuses pour personnaliser la majorité des pièces. Royal Dagger Ballet est un premier album qui prend le temps d’explorer ce que Bechet fait de mieux, un territoire électro-pop rempli de lieux visités comme une suite de scènes de film d’auteur.

L’album démarre d’un coup sur le rythme lourd de Black Exit, guidé par un duo à la ligne de basse et à la batterie, ou trio si l’on compte la cloche à vache. La voix de Paul Banks (Interpol) se place au centre et prend le contrôle du reste de la pièce sur un ton contemplatif et mélancolique. Ruby’s Wheel ouvre d’abord sur un motif percussif qui passe brièvement à un segment de ballade illuminé par la voix de YESH. Le thème aboutit à un mélange de dancehall et de R&B gonflé en scène cinématographique avec les percussions africaines et les cordes symphoniques. Metal Sky prend sa respiration à partir d’accords de guitare électrique réverbérée comme un solo rock dans un stade. L’élan initial ralentit, la pièce se pose gracieusement et Eiko Hara chante en souffles chuchotés à l’oreille, comme une balade électro-pop qui culmine rendue au refrain.

Mirage apparaît en forme de trame sonore étirée comme un ruban magnétique, et passe ensuite à un thème new wave dirigé par le chanteur Jonathan Bree. Le résultat est très cool et fait même sourire un peu parce qu’on aurait dit une collaboration entre John Carpenter et Peter Murphy. Crosswinds nous fait oublier ce qui s’est passé avec une descente à la harpe montée en boucle mélodique. Estrael Boiso (Bryce Janssens) accompagne le motif à la voix, doucement au début, et s’investit à pleins poumons comme dans une ballade triomphante de fin de film. La conclusion change joliment de direction avec le filament élastique de l’oscillateur et la voix trafiquée en duo avec les cordes. Hieroglyphs résonne comme une explosion 8-bit en boucle, et passe à une ballade électro à la basse saturée, combinaison adoucie par la voix de Karen O (Yeah Yeah Yeahs). Le montage est raisonnablement expérimental, voire improvisé et produit comme une maquette DIY.

Nighttime Rebound part d’une séquence rythmique saturée, avec une ligne de basse qui résonne et scintille. Dani Miller (SurfBort) suit la cadence vocalement sur un ton nonchalant, doublée par un effet à l’octave qui donne l’impression d’être au ralenti. Astra tourne en boucle sur un motif mécanique de salle des machines, qui est ralenti et qui s’arrête sur une basse monophonique électrifiée. Les échantillons de voix angéliques et les effets sonores se croisent comme des particules mélodiques. Les échantillons de voix ouvrent Royal Dagger Ballet comme un chœur synthétique, qui sert de toile de fond à une trame sonore de film avant-gardiste, à la The Art of Noise.

Royal Dagger Ballet est un album qui bénéficie de l’expérience de Bechet dans la composition de trames sonores pour proposer une forme d’électro-pop qui prend plus d’espace et de temps, et ne sert pas seulement à faire vibrer une boîte de nuit. Cela dit, il n’hésite pas à respecter à peu près tous les codes dans le genre pour plaire à tout le monde, impression qui est heureusement équilibrée par quelques passages expérimentaux. Une dualité qui renforce le thème sobre de l’exploration de la sonorité de TRZTN, ce qu’un premier album devrait faire de façon générale.

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