Critiques

Thirty Seconds To Mars

America

  • Interscope Records
  • 2018
  • 42 minutes
2

À une époque où les musiciens ne font plus un sou avec leur musique, il est miraculeux que des dizaines de parutions de qualité nous arrivent encore chaque semaine. Produire un album a longtemps été une entreprise demandant beaucoup de ressources budgétaires et de temps. Heureusement, la démocratisation des façons d’enregistrer de la musique de qualité fait en sorte que n’importe qui avec le talent requis peut se produire dans un dortoir étudiant.

Et il y a les Thirty Seconds to Mars de ce monde.

Ici, aucune austérité. America, leur cinquième album, est le buffet ouvert de la surproduction et de l’autotune. Des comptoirs à perte de vue de grooves et de boîtes à rythmes s’inspirant du R&B et de la pop formatée par de grandes compagnies de disques.

Dès les premières secondes, l’auditeur doit se faire à l’idée : les sonorités électroniques et les montées vocales fortement modifiées prennent toute la place. Pour ceux qui pensaient avoir un album de guitares à se mettre dans les oreilles devront peut-être se tourner vers METZ. Ou pas.

Dangerous Night et Dawn Will Rise ouvrent l’album avec un faux sentiment d’urgence où les rythmes R&B sont à l’honneur. Le festival du racolage se poursuit avec Great Wide Open, un insupportable gospel où le beau Jared ne se gêne pas à atteindre la note Prince, mais sans aucune subtilité. Les paroles sont un ramassis de clichés mille fois entendus :

I swear to God, I’m the devil
Raise your hands to the sky and praise
I’m a thief, you’re a liar
But we live in our wildest dreams

Great Wide Open

Les « 30 secondes » se lancent aussi dans un hommage bien senti aux années 80 avec la très suave Live Like a Dream où les claviers sont mis en mode centre d’achat avant de faire place à des gros « OH OH OOOH » au refrain. On voit déjà des salles remplies hurler à pleins poumons. Grand bien leur fasse.

Le meilleur moment se présente plus tard au programme avec Remedy qui fait place à la guitare acoustique. Bien que Leto tente de se faire passer pour un icône du grunge dans son timbre de voix, le résultat est tout de même louable. C’est ici Shannon Leto, le frère de l’autre, qui prend sa place au micro et qui a résolument écouté beaucoup de grunge du début des années 90. Cependant, le plagiat se poursuit avec le premier riff de guitare de Rescue Me qui n’est pas sans rappeler la formation The Police. Comme si ce n’était pas assez, le séduisant troubadour s’époumone en ouverture de Rider en parlant de « rider on a storm ». Vraiment ? Une autre balade qui fait place à une orchestration ostentatoire. Malgré tout, une génération d’ado en profitera pour danser leur premier slow dans le gymnase de leur école secondaire…

Pour le reste de l’album ? C’est du pareil au même. Quiconque aura aimé la première partie trouvera son compte pour la suite.

Des points positifs ? Comme mentionné en introduction, ça sonne. La production est sur les stéroïdes autant que l’est l’autotune. Kéveune de Laval et Jézeune de Val-Bélair pourront très certainement faire résonner le tout dans leur Civic coupé dès le retour du beau temps.

On ne pourra pas dire que la bande à Jared Leto n’a pas tout donné pour se réinventer. Mais le résultat demeure propre et dangereux comme du Coldplay.

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