Critiques

Roisin Murphy

Take Her Up To Monto

  • PIAS
  • 2016
  • 47 minutes
8
Le meilleur de lca

Au printemps 2015, l’ancienne meneuse de la formation Moloko, Roisin Murphy, faisait paraître Hairless Toys; disque sélectionné sur la longue liste du prix Mercury. Cette habituée des défilés de mode, arborant des costumes extravagants et proposant parfois des performances singulières dans certains musées d’art contemporain, crée un électro-pop des plus intéressants. Ceux qui me lisent régulièrement savent à quel point je ne suis pas friand de ce genre musical actuellement surexploité et inutilement racoleur… du moins, en ce qui a trait au traitement très «fédérateur» que le style reçoit.

Voilà qu’était révélé vendredi dernier Take Her Up To Monto, le 5e album studio de Murphy. La plupart des chansons colligées sur cet album proviennent des séances d’enregistrement d’Hairless Toys. Des liens sonores sont à faire, mais ces nouvelles pièces sont nettement moins accessibles que celles du précédent effort. Comment décrire cette belle bébitte que représente Roisin Murphy? La dame mélange habilement, avec grande originalité, l’électro-pop 80 à des influences aussi disparates que Radiohead (en format synthétique), Kraftwerk, Grace Jones et Angelo Badlamenti. Elle a également un peu d’Anne Clark et Yoko Ono dans le nez. Désolé pour le «name dropping», mais je n’avais pas le choix!

Lors des écoutes préliminaires, vous sortirez un peu abasourdi par tant de fantaisies sonores, de minimalisme champ gauche et de mélodies pop atypiques. Cependant, vous reconnaîtrez à ce disque de nombreuses qualités si vous persistez dans votre effort d’audition. Bref, voilà de la pop en toc qui sort sérieusement des sentiers battus. Vous seriez particulièrement fine bouche (ou un peu paresseux, c’est selon) de vous en passer.

Roisin Murphy, par son implication dans le monde de la mode et de l’art contemporain, propulse sa pop dans un univers unique. Et elle s’amuse ferme à démantibuler les rôles stéréotypés que la société accorde trop souvent aux hommes et aux femmes. Toujours, avec un certain humour, mais le message passe, croyez-moi.

Plusieurs chansons ont émergé du lot: le petit penchant Thom Yorke entendu dans Mastermind, la grandiose/minimaliste Pretty Gardens, la pianistique/labyrinthique (un peu à la Grace Jones) Thoughts Wasted, cette bossa-nova en plastique titrée Lip Service, la dépouillée Whatever ainsi que la conclusive et prenante Sitting And Counting.

Vous verrez des avis fort divergents à propos de ce Take Her Up To Monto. Certains critiques n’ont pas pris la peine de l’approfondir et il y en a d’autres qui préfèrent toujours leurs confortables pantoufles à une certaine prise de risque. Y’a rien à faire, c’est comme ça depuis que le monde est monde. Mais Roisin Murphy est une artiste qui bonifie grandement l’électro-pop. Elle nous escorte dans des zones inexplorées qui font autant référence à une sorte de cabaret enfumé franchement dépressif qu’à une pop accessible d’une intelligence supérieure. Si les artistes oeuvrant dans ce genre musical faisaient plus souvent preuve de créativité comme Roisin Murphy, je serais assurément preneur.

Ma note: 8/10

Roisin Murphy
Take Her Up To Monto
Play It Again Sam
47 minutes

http://www.roisinmurphyofficial.com/

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=E4xe-qiKE00[/youtube]