Critiques

The Jesus and Mary Chain

Glasgow Eyes

  • Fuzz Club Records
  • 2024
  • 49 minutes
7

Précurseure de la musique shoegaze, la légendaire formation écossaise The Jesus and Mary Chain pratique l’art du bruit depuis 1983. Composé du noyau des frères Jim et William Reid, le groupe s’est séparé en 1999, s’est reformé en 2007 pour donner des spectacles, puis a sorti Damage and Joy en 2017 et maintenant Glasgow Eyes. Comme les derniers albums, ce petit nouveau sert un rock alternatif satisfaisant, mais n’atteint jamais les mêmes sommets que les classiques Honey’s Dead de 1992 ou Psychocandy de 1985 (l’album Tylenol par excellence).

Même si certains albums se distinguaient par le mur de son (Psychocandy), le folk désenchanté (Stoned and Dethroned) ou les synthés robotiques (Automatic), le groupe a tendance à répéter le même modèle : guitares lourdes noisy, mélodies pop accrocheuses, paroles provocantes simples. Pour le meilleur et pour le pire, Glasgow Eyes n’y fait pas exception.

The Jesus and Mary Chain touche ici à plusieurs styles déjà apprivoisés. Alors que le son rock’n’roll oscille entre agréable et banal (comme sur American Born et Girl 71), le groupe offre une touche noise sous-utilisée et une approche électronique intéressante. En effet, les chansons jamcod et Hey Lou Reid (la coquille est délibérée) commencent toutes les deux avec des notes abrasives aguichantes qui s’estompent trop rapidement. Et, du côté électronique, Discotheque et Silver Strings contiennent des synthétiseurs sinistres, moins robotiques que sur Automatic heureusement, qui se combinent bien à l’instrumentation sans remplacer ce qui fonctionne déjà. 

Comme dans la formule décrite précédemment, The Jesus and Mary Chain éprouve toujours un penchant amusant pour les mots crus et répétitifs : « I’m on fire / Piss on fire / Don’t piss on fire / I pissed bleach to meet you » sur l’énergique Venal Joy ou « I fill myself with chemicals / To hide the dark shit I don’t show / To hide the dark shit I don’t show » sur la lente et mystérieuse Chemical Animal. The Jesus and Mary Chain a également l’habitude de nommer des célébrités (de JFK à Kurt Cobain en passant par le fameux Jésus évidemment). Sur The Eagles and The Beatles, le groupe ne déroge pas à la règle comme le titre l’indique, mais propose un rythme plus conservateur et des formulations plus sages, donc un tout moins efficace. En plus, le court solo de guitare chaotique ne suffit pas à répondre au besoin de bruit créé par la formation. 

Glasgow Eyes peut lasser avec son rock‘n’roll classique souvent entendu, mais apporte malgré tout quelques ballades délicieusement hypnotisantes. Pure Poor séduit par sa mélodie lente et déconstruite et ses paroles simplistes faisant ressortir le chant agréablement agonisant. Cette combinaison donne une musique psychédélique noise rafraîchissante. De son côté, Second of June met en valeur la voix sincère et délicate de Jim Reid et rappelle brièvement le rock épuré que le groupe faisait à la fin des années 90 (comme sur Sometimes Always).  

Glasgow Eyes trouve refuge dans le style propre à The Jesus and Mary Chain, qui en est un ayant fait ses preuves. Si la formation ne tombe pas trop dans la facilité sur cet album, elle ne consacre pas beaucoup d’efforts à se réinventer non plus. À craindre de faire pire, le groupe n’ose pas faire beaucoup mieux. Là où certains pairs comme Brian Jonestown Massacre ou Spiritualized arrivent encore à captiver l’attention de façon attrayante, The Jesus and Mary Chain stagne dans une zone confortable et produit des œuvres sans réel faux pas, mais sans nouveauté particulièrement impressionnante. 

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