Critiques

Drab City

Good Songs For Bad People

  • Bella Union
  • 2020
  • 33 minutes
8
Le meilleur de lca

Drab City est un mystérieux duo basé à Berlin ou aux États-Unis, selon la source, et formé de Chris Greenspan (oOoOO) et Asia Nevolja (Islamiq Grrrls), les deux ayant des racines dans les genres witch house et électro-pop. Good Songs For Bad People donne une indie rock électro groovy, aussi sensuelle qu’inquiétante, s’aventurant plus loin que les racines musicales respectives de ces deux musiciens : une évolution mature et une belle création unique.

La légende veut qu’ils se soient rencontrés en travaillant dans une usine, puis leur relation se serait solidifiée en foxant l’ouvrage pour aller écouter de la musique. Une rencontre dans la même lignée que cette musique de style bande sonore pour marginaux en cavale faisant des sorties nocturnes dans des quartiers non recommandables. 

Good Songs For Bad People commence par la simplement nommée Entering Drab City. Une invitation sans paroles qui intrigue par son folk non conventionnel et ses accents glauques. C’est à partir de la deuxième chanson que le style étrange du groupe est véritablement établi : une indie rock renforcée notamment d’échantillons électroniques intéressants, de trip hop et de folk des années 60, le tout sur un fond d’expériences angoissantes et romantiques. Une combinaison délicieusement déroutante. 

Dans cette deuxième pièce intitulée Working for the Men, Asia dévoile sa voix aérienne et désenchantée sur une douce mélodie pop accentuée de flûte telle une vieille chanson folk. Elle raconte de façon légère et insouciante une histoire de vengeance contre « the man » : une explosion au travail où elle reçoit du petit change en guise de salaire. Peut-être un fantasme en lien avec l’expérience du duo en usine. 

« Fifty canons will load 
Down by the shore 
Little they know 
Soon they blow up 
This place in the air 
And there will be no more »

– Working for the Man

L’album se démarque surtout par ses nombreuses mélodies à la fois dansantes et menaçantes combinées à la voix séduisante et féminine ainsi qu’aux percussions et à la basse intenses et intimidantes. Un style envoûtant retrouvé notamment sur deux des chansons qui ressortent le plus du lot : Devil Doll qui peut rappeler le style indie pop-rock au charme vintage de Lana Del Rey, et la plus électronique Hand in my Pocket qui explore un monde idéal séparé de la société dangereuse. Avec Chris au chant, Live Free & Die When It’s Cool ensorcelle aussi avec une indie rock rehaussée de rythmes détendus et de guitares agressives.

Ce genre bien maîtrisé par le duo atteint des sommets avec l’excellente Troubled Girl. La mélodie attire par son énergie groovy et langoureuse et ses sonorités étonnantes. Elle donne envie de céder à la diabolique tentation de manger cinq beignes à minuit… ou bien d’embarquer dans la décapotable d’une mauvaise fréquentation. Cette chanson explore encore le thème de la personne marginale se cherchant dans un monde difficile qui ne lui ressemble pas : 

« There was a troubled little girl 
From a small troubled town 
With nowhere to go 
And always a frown »

– Troubled Girl

Good Songs For Bad People procure une courte expérience satisfaisante qui transporte dans un univers attrayant, dérangé et un peu lynchien. L’atmosphère lugubre y est constante et les thèmes abordés sont humains, mais détachés. La combinaison complexe de plusieurs styles et instrumentations met au monde un style simple et pur, à la fois rêveur et tourmenté, sensuel et morose. Le genre d’album créatif nécessaire qui donne l’impression que l’intention des deux musiciens de Drab City était de simplement jouer de la musique qu’ils avaient envie d’entendre, mais qu’ils ne retrouvaient pas ailleurs. Un album prometteur d’un groupe qui refuse de se réduire à un seul genre. 

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