Critiques

Dehd

Flower Of Devotion

  • Fire Talk
  • 2020
  • 38 minutes
7,5

Il y a une synergie remarquable au sein du trio originaire de la Ville des Vents. Écoutez bien cette histoire. Lors de l’enregistrement de leur précédent album, Emily Kempf, meneuse du trio Dehd, se séparait d’une longue relation amoureuse avec Jason Balla, guitariste de la même formation. Aucun doute derrière la tâche ardue d’enregistrer un album dans l’ambiance d’une séparation amoureuse, Water était un album crève- coeur, un album de pot de crème glacée vidé à la cuillère. Après un an de silence où Kempf s’isole pour mieux réfléchir à son avenir au sein du groupe, la troupe se résigne et signe un nouvel effort. Flower of Devotion, pour sa part, est la célébration d’une séparation justifiée.

Facile de croire que la rupture amoureuse entre Balla et Kempf aurait pu mettre fin à la formation. On se souvient de l’enregistrement douloureux de Heaven or Las Vegas où Elizabeth Frazer avait enregistré sa voix séparément des autres Cocteau Twins, en pleine rupture amoureuse avec le multi-instrumentiste de la même formation Robin Guthrie. Au contraire, Balla et Kempf se complètent à merveille, ils le savent et, pour l’amour du groupe, ont mis leurs différends de côté. Ce qui en ressort est un album simpliste où l’on utilise que guitare, basse, batterie et voix, mais où le trémolo de la voix confiante d’Emily Kempf se hisse comme l’instrument le plus important du groupe.

Flower of Devotion ne détient aucune piste dépassant la marque des quatre minutes, une stratégie qui fonctionne puisque les mélodies constamment entraînantes s’enchaînent rapidement, laissant l’auditeur victime du rythme, s’y abandonnant complètement. L’opus est d’une durée de 38 minutes de danse mélancolique et solitaire. On y raconte l’acceptation du présent, sans remords, sans compromis. « I’ve had enough of each other – want nothing more than to be a loner », chante Kempf avec assurance sur la pièce Loner. « If this is all that we get, so be it – It was worth it to know you exist », contemple Kempf sur le dernier morceau de l’album, Flying. Il y a une maturité prenante derrière le comportement relationnel de la troupe qui semble soudée malgré les épreuves.

Si le propos lyrique diffère entre le premier album homonyme, Water et Flower of Devotion, la sonorité reste extrêmement semblable et ne présente aucune surprise pour les amateurs du groupe. En quelque sorte, on peut admettre que le trio assume leur son, mais on pourrait se questionner sur la constance prévisible des compositions du trio, ne créant aucune erreur de constance entre les trois opus.

Dehd, c’est en quelque sorte l’enfant de la contre-culture rock américaine des années 80 qui a fait naître le rock shoegazing des maîtres du genre; Sonic Youth, Slowdive et My Bloody Valentine. D’actualité, on peut aussi tracer plusieurs points communs entre la groupe de Chicago et la formation new-yorkaise, DIIV. Si la formation menée par Emily Kempf ne se démarque pas tant par l’unicité de leur musique (ce qui s’avérerait, ma foi, être un exploit notoire dans la postmodernité actuelle), le trio nous propose, bien franchement, un bon album, un album meilleur que ses précédents, où les mélodies à la guitare de Jason Balla et le brio vocal d’Emily Kempf témoignent un talent indéniable.

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