Critiques

Big Brave

A Chaos of Flowers

  • Thrill Jockey Records
  • 2024
  • 40 minutes
8
Le meilleur de lca

Un peu plus d’un après nature morte, Big|Brave est de retour avec A Chaos of Flowers, son septième album. Bien que les pochettes de cet album et le précédent semblent se répondre, les deux ne sont pas liés et même montre le groupe montréalais sous différents angles. Pour écrire ce nouvel album, Robin Wattie a plongé dans la poésie et les textes issus de la tradition folk. D’abord cherchant dans ce qui appartenait au domaine public, Wattie c’est rapidement rendu compte que c’était presque entièrement des textes écrits par des hommes auxquels elle ne pouvait pas s’identifier en tant que femme. Elle a donc poursuivi ses recherches qui lui ont permis de redécouvrir des textes de poétesses qu’elle aime telles qu’Emily Dickinson ou Renée Vivien.

Pour travailler sur l’album, le trio s’est à nouveau entouré de la guitariste Marisa Anderson, le guitariste Tashi Dorji et le saxophoniste Patrick Shiroishi alors que le preneur de son et réalisateur Seth Manchester était derrière la console.

On retrouve sur A Chaos of Flower une autre collection de chansons qui flirtent avec le noise, le drone et le doom métal. Le tout permet de faire vivre des poèmes d’une autre époque dans un univers qu’ils n’auraient jamais pensé visiter. Robin Wattie y va même d’une première performance vocale en français alors qu’elle a adapté Chanson pour mon ombre de Renée Vivien, une poétesse homosexuelle du début du siècle dernier morte à l’âge de 32 ans, rongée par l’anorexie et l’alcoolisme. Il y a dans la tragédie de la vie de Vivien et le ton préféré par Wattie quelque chose qui se rejoint. Vivien a vécu une vie difficile en raison de sa sexualité à une époque où c’était considéré une maladie mentale. Doublez ça d’un monde qui n’était pas particulièrement doux pour la femme en général et vous avez la recette pour un mal d’être assez important. C’est celui-ci qu’elle réussit à transmettre à travers sa voix claire.

Canon : In Canon offre aussi de beaux moments alors que la guitare de Matthew Ball est bruyante et vient comme les vagues de l’océan. Ayant toujours le mot juste, Tasy Hudson n’ajoute presque rien à la pièce à part cet incessant coup de cymbale qui n’est pas très fort. Le tout est magnifique. I Felt a Funeral adapté du poème I Felt a Funeral in My Brain d’Emily Dickinson est aussi très intéressante en début d’album alors que la voix de Wattie nous mène au moment où les guitares font leur apparition.

Il y a une certaine légèreté pour un album de Big|Brave sur A Chaos of Flowers. C’est très clair sur Moonset. Ce n’est pas parce que c’est moins lourd qu’à l’habituel qu’on est soudainement dans quelque chose de doux. Mais c’est plus aérien comme manière de creuser les sonorités préférées par le groupe.

Encore une fois, Big|Brave offre une œuvre magnifique qui creuse le métal et le noise rock dans un sens absolument unique. Le trio démontre pourquoi il est l’un des groupes les plus pertinents du genre par ses expérimentations constantes, sa manière différente de traduire le désespoir humain et son regard sombre sur une société trop violente à leur goût.

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