Critiques

Blur

The Ballad of Darren

  • Warner Bros. Records
  • 2023
  • 36 minutes
7

En mai dernier, l’emblématique formation a pris tout le monde par surprise en annonçant son retour à la vie. Huit ans plus tôt, Blur nous avait présenté The Magic Whip; un bon disque de vétéran qui constituait un habile mélange du pop-rock qu’a toujours proposé le groupe et de l’univers sonore plus varié de Damon Albarn.

Voilà donc le neuvième album studio du quatuor. Intitulé The Ballad of Darren, ce long format, réalisé par James Ford (Arctic Monkeys, Depeche Mode), est rempli de réflexions et commentaires sur la situation sociopolitique qui prévaut actuellement en Grande-Bretagne. Du moins, c’est ce qu’affirmait Albarn dans le communiqué de presse qui nous a été transmis.

Écrit et composé par l’auteur-compositeur alors qu’il était en tournée avec Gorillaz, et enregistré l’hiver qui a suivi cette série de concerts, ce nouvel opus a pris forme très rapidement, semble-t-il. Pour une rare fois dans la carrière de Blur, le processus créatif s’est déroulé sans entraves et à un rythme soutenu.

The Ballad of Darren est un album qui doit être écouté comme une sorte de bilan de la carrière du groupe. Ces cinquantenaires ont vécu le succès de masse avec tout ce que ça implique de moments extatiques, mais aussi de profondes désillusions. Ces vieux routiers sont désormais en excellente position pour observer et commenter la trajectoire sociale et économique de leurs compatriotes tout en la reliant à leur propre parcours. En fait, l’itinéraire existentiel de ce quidam britannique qu’est Darren est parfaitement connecté à celui de Blur… malgré l’argent et la célébrité!

Dans l’introductive The Ballad — pièce qui évoque les sonorités feutrées et plus récentes de la formation Arctic Monkeys —, Albarn, d’une voix posée, émet un constat lucide et un peu cynique sur les relations amoureuses :

I just looked into my life

And all I saw was that you’re not coming back

Oh, can’t you see when the ballad comes for you

It comes like me?

– The Ballad

Dans Barbaric, le chanteur-parolier pose un regard sans complaisance sur la direction sociopolitique que ses compatriotes anglais semblent vouloir emprunter :

We have lost the feeling that we thought we’d never lose

Now where are we going?

We have lost the feeling that we thought we’d never lose

It is barbaric

– Barbaric

Musicalement, Blur mise sur la beauté des orchestrations et sur les mélodies plutôt que sur l’énergie rock qui a fait sa renommée. Les chansons sont simples et s’éloignent significativement des expérimentations qu’affectionne particulièrement Albarn. Le quatuor nous présente un long format qui, sans être exceptionnel, est chaleureux, réconfortant et intemporel. Et le groupe n’essaie surtout pas de renouer avec « le bon vieux temps ».

Parmi les bons moments qui ont particulièrement capté l’attention de l’auteur de ces lignes, on salue The Everglades (For Leonard), morceau dépouillé qui a été conçu dans une chambre d’hôtel, à Montréal, situé tout juste en face de la murale emblématique de Leonard Cohen. The Narcissist est du Blur pur jus, pièce qui aurait pu paraître au beau milieu des années 90. La guitare dissonante de Graham Coxon dans St. Charles Square évoque les meilleurs moments de la mythique formation indie rock états-unienne Pavement. The Heights, chanson qui porte sur la relation tissée serrée qui unit le groupe et ses admirateurs, conclut l’album en une magnifique montée cacophonique qui s’estompe brusquement. Deux ombres au tableau : les quelconques Goodbye Albert et Avalon qui n’atteignent pas les standards mélodiques entendus tout au long de l’opus.

The Ballad of Darren n’est pas un exceptionnel dans la discographie de Blur. Or, c’est un disque lucide et tranquille qui s’écoutera très bien un dimanche matin en compagnie de l’être aimé.

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