Critiques

blesse

normal

  • Simone Records
  • 2023
  • 39 minutes
7,5

Né des cendres de la formation Zen Bamboo, le trio formé de Léo Leblanc, Charles-Antoine Olivier et Xavier Touikan propose une musique vraiment intrigante. Depuis l’été 2022, le groupe a lancé plusieurs simples qui ont chatouillé les oreilles de l’auteur de ces lignes. Le mélange insolite d’indie rock, d’hyperpop, de post-punk et de « chamber pop » présenté par la formation est d’une incontestable originalité; un métissage sonore assez intéressant.

Réalisé par le trio lui-même, et avec l’aide du réalisateur Valentin Ignat, blesse lance enfin son premier long format en carrière intitulé normal. Enregistré dans deux studios distincts, — le Breakglass et le Mixart — la formation a également colligé plusieurs pistes dans son studio maison improvisé, situé à Saint-Zénon dans la région de Lanaudière.

Tout ce bricolage réalisé en studio n’est pas étranger aux chansons tortueuses et fringantes que proposent blesse. La conclusive 4 ans est peut-être la quintessence de cette folie que cherche à exprimer la formation. Après une introduction que l’on pourrait qualifier de folk synthétique, la chanson se transforme en un cirque sonore délirant pour se conclure dans un rock bien gras… à la Weezer ! Et ce type de volte-face est légion dans ce premier album.

anyfuckingway — morceau qui compte sur la collaboration de l’auteur-compositeur Thierry Larose et du bassiste Sam Beaulé — se démarque également par une ligne de basse légèrement dissonante et des voix distordues au refrain, comme si la formation Grandaddy versait dans l’électro-rock.

Si blesse a préféré dévoiler son côté givré en première partie d’album, le trio brouille magnifiquement les pistes à partir de creusercreuser — pièce qui mise sur la participation de Sophia Bel — et ce jusqu’à la fin de l’opus. Météore avec ses airs de pop synthétique rassembleurs est trop sinueuse pour être un médiocre ver d’oreille. La conclusion lo-fi dans perle plastique nous fait oublier les mélodies « indochinesques » qui s’imposent subtilement.

Côté textes, le trio est parfaitement cohérent avec sa démarche musicale, préférant l’hermétisme et les doubles sens à une approche plus concrète. Dans creusercreuser, le personnage principal semble être mal dans sa peau, au point peut-être de vouloir transformer sa carapace corporelle :

Je ferme les yeux pour respirer

Mais que fais-tu de ta journée ?

Dans un corps inhospitalier

Vas-tu un jour aimer ?

J’ai besoin d’excuses pour avancer

Reviendrais-tu toujours à toi ?

J’aimerais crier pour une fois

– creusercreuser

Parmi les autres moments attractifs de ce normal, on vous conseille de prêter l’oreille attentivement au rock synthétique / méandrique entendu dans petite lune. La « malajubienne » amour aride est franchement solide et la basse crasseuse dans crédule possède un-je-ne-sais-quoi de post-punk. Mention spéciale au mixage parfois fébrile qui permet à cet album de détonner par rapport à ses semblables.

En fait, normal est tout sauf… normal ! En mélangeant la pop synthétique et l’indie rock, en plongeant certains segments chansonniers dans une esthétique lo-fi, blesse propose un album assez singulier dans cet univers musical québécois, parfois un peu trop docile.

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