Concerts

James Taylor le 28 avril 2022 au Centre Bell

James Taylor et Jackson Browne étaient de passage au Centre Bell jeudi dernier avec leurs formations complètes. Une soirée de retrouvailles, de communion à l’autel du folk rock parfait, de bienfaisance pour les âmes esseulées, de chaleur humaine en combustion lente et surtout de musique d’une esthétique et d’une vertu exceptionnelle.

Les dix musiciens du faiseur de chansons de 74 ans, qui a grandi à Chappel Hill en Caroline du Nord pour s’établir plus tard dans la région de Boston, dont le légendaire batteur jazz et rock Steve Gadd, quatre choristes, un percussionniste enveloppé de congas et de timbales, d’un guitariste aux interventions chirurgicales jouissives ont tout mis en oeuvre pour offrir au spectateur l’écrin musical digne de ses sublimes brûlots transgénérationnels.

Vous pensez qu’on a assisté à un bivouac pour têtes grisonnantes? D’un tour de chant muséal et passéiste? Nenni! La mise en scène et le décor sont remplis de belles trouvailles: une trentaine de petites lanternes qui montent et descendent au-dessus des musiciens, un écran gigantesque à l’arrière qui, comme c’est devenu la norme, nous montre les protagonistes en gros plan, ou des animations, montages photos, c’est bien dosé, on est jamais sur sollicité de visuels. Et cet effet de serre avec un gros arbre qui surplombe les musiciens, c’est feuillu partout, on dirait du 3D ou une réalisation de Moment Factory. On est ailleurs, l’illusion est parfaite.

Dès l’obscurité, un court film sur un étroit et long lambeau de tissus au-devant de la scène aligne les témoignages de musiciens amateurs de toutes provenances et cultures qui remercient l’artisan pour ‘l’ensemble de son oeuvre’’. Belle entrée en matière. Country Road démarre le concert sur les routes secondaires d’Amérique. Version plus douce que celle jouée à la Salle Wilfrid-Pelletier au FIJM il y a quelques années.

James Taylor s’adresse en français à la foule. Un français de haute tenue, aucun accent, comme celui de ses compatriotes Jodi Foster ou feu William Hurt, le public fait: whooooooo! Ravi et rouge de plaisir. La classe, on vous dit! Trois chansons plus loin, c’est l’ensoleillée Mexico, le concert prend dès lors son envol. On se dégourdit les jambes, mais on n’est pas dans une cadence latino effrénée là, juste quelques rotations de bassin effectuées sans complexe.

Plus tard, un spectateur lance: birthday! C’est à ce moment précis qu’il enfile sa guitare Fender Telecaster à la façade bleue et se prête au jeu de la ritournelle d’anniversaire avant de digresser vers les accords blues de Steamroller (qui figure en version live sur son anthologie parue il y a des lunes). Le ressenti est très fort dans les doux méandres de ce blues lent, la vedette de la soirée cabotine et appuie chaque vers d’une gestuelle humoristique.

Autre moment marquant, Taylor nous raconte sa passion pour une bande dessinée datant de 1927 (tiré de Merrie Melodies, avec le fameux: That’s All Folks!), surgit alors un gigantesque téléviseur qui nous montre la BD en toile de fond de Easy As Rolling Off a Log.

Les cinq dernières chansons avant le rappel nous ramènent avec bonheur à ses immortelles du début des années 70. Deux albums déterminants, Sweet Baby James et Mud Slide Slim, ont érigé les fondations de sa renommée. Carolina in My Mind, Fire and Rain (LE show stopper de la soirée), Shower the People et How Sweet it is (to be loved by you)… surtout pour ce passage: ‘’it’s like gelly sometimes’’…Injection de sourires.

Le rappel de quatre titres proposait notamment You’ve Got a Friend de son amie Carole King (le moment lumière du téléphone brandi dans les airs sous forme de communion!) et de Take it Easy, premier succès du groupe The Eagles, chanté par Browne, revenu sur scène pour cette belle finale.

Jackson Browne

En première partie, Browne, autre gloire de l’Americana était dans une forme splendide, avec un ensemble complet, deux choristes, etc. On a bien sûr eu droit à ses meilleures, Doctor My Eyes, son premier succès paru à la même époque, issue d’une parenté musicale avec les America, Don McLean (American Pie), Ian Thomas (Painted Ladies) et autres chansons d’artisans pop-folk mi-seventies qui ont trouvé leur chemin sur les palmarès radio. Sa voix de septuagénaire est intacte. C’est magnifique et ses chansons passent comme une lettre à la poste, rien de suranné ici. Browne pour une rare escale à Montréal, nous a servi quelques chansons de son disque Running on Empty, son plus grand succès en carrière et a d’ailleurs clos son spectacle avec la chanson titre, hymne à la liberté, au refrain imparable..

James Taylor, lui, le barde accompli, nous a bercés toute la soirée comme un ami qui vous veut du bien. Et on acquiesce, on se laisse dorloter l’existence en murmurant chaque mot ou presque de ses petits chefs d’œuvres. On distingue tout de cette sonorisation limpide dans ses plus riches nuances, les dix-sept chansons offertes au public montréalais.

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