Concert: Guns N Roses – Parc Jean Drapeau – 19 août 2017
Quand j’étais gamin j’étais obsédé par Guns N’ Roses. Ma voisine Émilie me les a fait découvrir à 8 ans et je n’ai plus jamais écouté ma cassette des New Kids On The Block après ça. Je suis passé du band de gars propres avec un rebelle aux jeans déchirés au band où il y avait juste des gars avec des jeans déchirés qui fumaient des cigarettes, buvaient du Jack sur le stage et se battaient avec les journalistes et leurs fans. J’étais pas tout seul à aimer ça. Même la revue 7 jours en parlait à toutes les semaines dans ce temps-là. Posters, stickers, cartes à collectionner, etc.
À l’été 1992, j’avais 10 ans et j’essayais de négocier avec mon père pour avoir mon cadeau de fête à l’avance : un billet pour le show de Guns et Metallica au Stade olympique. J’étais pas fan de Metallica, mais je m’en foutais parce que c’était la bande à Axl en haut de l’affiche. Les négociations ont été fermées par un NON catégorique lancé par le patriarche despote un soir de juillet et je n’ai pu que constater qu’il avait finalement eu raison de ne pas m’envoyer dans le chaos qui s’ensuivit au mois d’août. N’empêche, avec le temps, j’ai idéalisé le reportage de Geneviève Borne sur le déroulement des événements et je le considère encore comme le meilleur moment de télé des années 1990. J’aurais aimé ça être là, virer un char de police à l’envers et sentir l’odeur de brûlé des t-shirts de Guns en flammes. N’importe qui ayant vécu un show où il se passe quelque chose de vraiment sketch vous le confirmera : l’adrénaline est une bonne drogue.
25 ans et deux semaines plus tard, j’ai finalement vu le band le plus important de mon enfance. DANS TA FACE SON PÉRE! Voici comment s’est déroulée ma soirée.
18 h 45
On arrive au parc Jean-Drapeau en métro et on s’assoit dans un petit boisé, satisfait d’entendre Our Lady Peace uniquement en tant que faible rumeur au loin. Comme on a manqué le show de Metallica au mois de juillet, on savait juste pas qu’il nous restait 35 minutes à marcher. Résultat : On est arrivé flush à 19 h 30, heure annoncée du début de ce spectacle-marathon.
19 h 30
Le show commence pile à l’heure. What? J’aurais aimé ça qu’Axl nous fasse au moins un petit suspense, mais bon, je suis quand même trop content d’entendre It’s So Easy et je m’empresse de sortir ma voix de tête pour ma meilleure imitation du leader de Guns. Les gens sont tellement heureux d’être là que quelqu’un m’offre de prendre sa place dans la file de la bière avec un gros sourire. Merci man! Sur la scène, les Gunners originaux Slash, Duff et Axl sont accompagnés par le vétéran Dizzy Reed au clavier, Frank Ferrer, un drummer que je n’ai jamais vu de ma vie, un second guitariste qui ressemble au chanteur des Respectables nommé Richard Fortus et Melissa Reese, une claviériste-choriste qui pourrait être la fille d’Axl.
19 h 45
Après une excellente Mr. Brownstone, le groupe enchaîne avec Chinese Democracy, chanson-titre de l’album du même nom, qui refroidi pas pire la foule. Il a même fallu que j’explique au couple de quarantenaires à côté de moi c’était quoi la chanson. D’après moi Best Buy a enterré des milliers de copies de cet album-là dans le désert mexicain à côté des cassettes du jeu de E.T. à l’Atari. Coudonc, chu tout seul à avoir écouté ce disque-là intégralement ou quoi?
19 h 50
C’est déjà le moment de se taper Welcome to The Jungle. Oh yeah! Ce sera suivi de près par une de mes favorites de l’ensemble de leur catalogue : Double Talkin’ Jive. Impeccablement interprétée par le groupe et surtout Slash. C’est essentiellement pour lui que je suis là ce soir. Son phrasé unique, mélange habile de technique et de feeling est difficilement imitable et il est clairement l’un des derniers guitar heroes vivant. Bref, j’aime Slash comme au premier jour.
20 h 10
Les voilà de retour avec une autre chanson de Chinese Democracy, Better, qui laisse encore les gens un brin confus. C’est le moment d’aller faire un tour à la bière ou aux toilettes. Estranged commence ensuite et c’est aussi magique que ce à quoi je m’attendais. Des gros frissons me passent dans l’échine. La voix d’Axl à atteint sa vitesse de croisière. Il est en forme, mais on sent que ça achève un peu. Son criard s’est toujours usé rapidement sur scène. C’était vrai en 1991 et c’est encore vrai aujourd’hui. Considérant que la pente à remonter depuis la séparation du trio central a été ultra-rough, on lui pardonne tout.
20 h 20
Première de nombreuses reprises qui seront jouées dans la soirée, Live and Let Die est davantage une toune de Guns qu’une toune des Wings dans ma tête. Probablement parce qu’elle est une partie indispensable de Use Your Illusion I. Rocket Queen et You Could Be Mine, encore une fois excellentes et tight comme ça ne se peut pas nous mènent vers un micro-medley de reprises punk chantées par le solide bassiste Duff McKagan et qui ont été immortalisées sur The Spaghetti Incident? L’intro de You Can’t Put Your Arms Around a Memory de Johnny Thunders se transforme rapidement en Attitude des Misfits.
20 h 50
This I Love commence et c’est clairement la moins bonne des trois chansons de Chinese Democracy qui seront jouées ce soir. Heureusement, c’est à ce moment-là qu’une joyeuse bande de dudes déguisés en membres de Guns avec perruques, haut de forme et bandanas se décident à venir danser/être chaud funnés à côté de moi et mon pote Perceval Barry (tu peux le stalker sur FB) qui a échappé ma bière pendant que je les filmais avec leur consentement ainsi qu’une de ses deux bières qui a été knockée hors de ses mains par le faux Axl qui a raté le high five qu’il voulait me faire. Le faux Slash s’est empressé de lui donner sa bière, évitant ainsi un conflit digne de l’affrontement Guns–Nirvana 92. Ben non! On n’est pas à 15 piastres prêt les boys!
21 h 00
Je passe une bonne partie de Civil War avec le chapeau du faux Slash sur la tête pendant qu’il cherche ledit couvre-chef au sol. « Hey man look up here! » « Oh shit! Thanks bro! » On aurait dit une reconstitution éthylique de la scène de la bague entre Duff et Slash dans le clip de November Rain! J’ai du gros fun pendant Yesterdays et la pièce-fleuve Coma qui voit le groupe quitter la scène pour laisser Slash jammer sur Johnny B Goode à grands coups de solos acrobatiques. Le show était encore loin d’être fini.
21 h 10
Le groupe est de retour après que Slash ait bifurqué vers le thème du Parrain de Nino Rota et puis BOOM! Sweet Child O’ Mine déclenche une ovation monstre dès les premières notes du lick le plus célèbre du groupe. Avec des écrans géants montrant des tapisseries de têtes de squelettes, des roses et des balles de fusil, on se croirait dans Guitar Hero 3 sur PS2. Suivront Used to Love Her et My Michelle, glorieuses pièces moins connues de l’époque du classique Appetite for Destruction.
21 h 30
Le groupe quitte encore et Slash et Seb Plante… euh Richard Fortus se lancent dans une reprise en duel de Wish You Were Here, toune méga brûlée par tous les fatigants qui jouent de la guitare acoustique autour d’un feu à travers le monde. On se doutait que ça allait arriver, n’ayant pas été capable de résister à l’envie d’aller consulter les différents setlists de la tournée sur l’Internet quelques jours avant. C’est un peu boring mais ce n’est pas trop long et Axl revient s’installer au piano pour November Rain, toune que j’ai longtemps essayé d’haïr en vain. C’est le dernier grand moment du concert.
21 h 50
Le groupe se lance dans une reprise de Black Hole Sun de Soundgarden en hommage au chanteur Chris Cornell décédé récemment. C’est un mauvais move pour plusieurs raisons. Après plus de deux heures de show, c’est physiquement impossible pour Axl de ne pas rusher que le tabarnak pour essayer d’accoter la version de feu, de feu Cornell. Ce n’est pas tout à fait le même calibre de chanteur. Ensuite, en tenant compte de la quantité de bonnes chansons originales que le catalogue de Guns contient, il leur reste beaucoup trop de reprises à jouer (Knockin’ On Heavens Door de Dylan, Whole Lotta Rosie de AC/DC, The Seeker de The Who et You Know My Name, encore de Chris Cornell). J’aurais de loin préféré Right Next Door to Hell, Don’t Damn Me ou Garden of Eden, tant qu’à avoir Guns N’ Roses dans ma face.
22 h 00
Le reste du setlist consulté en ligne nous convainc de quitter le site tôt afin d’éviter d’être pogné dans un embouteillage de piétons de plusieurs heures sur l’île. En marchant, je sirote un Monster Energy Drink dégueulasse remis gratuitement par une fille de promo qui aurait pu jouer dans le clip de Don’t Cry que l’on entend en fade-out pendant qu’on s’éloigne. Au final, j’aurai raté 4 tounes originales qui ne font pas partie de notre liste d’incontournables (Nightrain, Don’t Cry, Patience et Paradise City). Pas trop grave, j’ai déjà amplement satisfait mon envie de triper nostalgie. La boucle est bouclée.
22 h 30
Je rentre sur l’île un peu maussade en me disant que la chose que je pensais être la plus thrillante ever à 10 ans est devenue un divertissement safe et propre pour toute la famille. On peut aussi blâmer l’Internet pour la suppression instantanée de toute surprise, surtout en ce qui concerne les shows de rock d’aréna. Mais bon, étant donné que je me suis fait casser les lunettes dans la face dans un show de Power Trip aux Foufs plus tôt cette année, je me dis qu’il reste du danger ailleurs et que c’est normal que les temps changent.
C’est samedi, la soirée est encore jeune, le dépanneur est encore ouvert pis le Monster vient d’embarquer.
Welcome back to the jungle.