À l’aube de la sortie de son prochain EP Les Odyssées, Alexandre Bernhari, installé à Paris depuis quelques années, a gentiment accepté de se dévoiler le temps de répondre à quelques questions. En voici des éléments essentiels. 

C’est une entrevue plutôt décontractée qui s’est déroulée entre Bernhari et moi. On a parlé de sa vie des dernières années, de son nouvel EP Les Odyssées à paraître le 22 mars, des gens avec qui il a collaboré, puis de sa philosophie, de son ouverture et de tout ce qui l’habite au quotidien et dans sa création. 

Presque six années nous séparent de sa dernière sortie, un autre EP, paru en France. Lorsque je lui ai demandé si le moment avait été choisi, Bernhari avance : «  il n’y a pas eu de calculs quelconques, j’en suis arrivé au moment où j’ai fini les choses et j’étais prêt à les donner. Ç’a mis beaucoup de temps ». Sans avoir retenu les choses, plusieurs facteurs ont influencé ses dernières années, dont celle d’élire en permanence son domicile à Paris, désormais dans un appartement situé à Picpus.

C’est d’ailleurs ce changement drastique et houleux, ce nouveau départ, qui se veut sa trame de fond. En ce qui concerne la musique lors de ces dernières années parsemées de la COVID et de remises en question, il mentionne que : « ç’a été un processus extrêmement complexe émotionnellement, même que j’ai souvent pensé que je n’allais plus jamais revenir. […] Y’a des moments où je ne voyais plus la suite et ç’a longtemps été un combat avec moi-même; puis d’avoir réussi à finalement refaire surface, pour moi, c’est un très très grand accomplissement ».

Nouvelle indépendance

Dans le même sens d’idées, Bernhari avoue sa fierté de s’orchestrer indépendamment d’une maison de disque, ce qui avait été contraire dans le passé avec Audiogram au Québec et une autre en France. Là-dessus, il dit : « Là, je repars de zéro. C’est angoissant, très très excitant et très très emballant comme processus ». C’est lorsque s’entament les démarches de son plus récent album qu’il réalise l’ampleur de tout faire soi-même, une charge qu’il qualifie de « colossale », mais un ensemble de responsabilités qu’il trouve « sain » de porter.

Autrement, il mentionne que le processus inverse avait eu lieu lors de la sortie de ses deux premiers LP, Bernhari et Île Jésus. En tournée pour le premier, le musicien a rapidement réalisé « qu’il manquait quelque chose, qu’il manquait une dimension au spectacle », et c’est pourquoi il a voulu entamer rapidement le travail sur le second. C’est une décision que les médias lui ont maintes fois reprochée selon lui. On peut dire que c’est en quelque sorte le déclic qui lui a fait dire : « bon, là je vais vraiment prendre mon temps ».

Pour boucler la boucle sur la notion du temps, Bernhari a mentionné que son étroite collaboration avec des membres de Feu! Chatterton, surtout le compositeur Clément Doumic, a fait en sorte d’étirer le processus étant donné que le groupe pour lequel il a assuré la première partie à de nombreuses reprises est une bande bien occupée. La plupart du temps, les sessions en studio étaient espacées les unes des autres. Nous reparlerons de cette collaboration. En attendant, Alexandre Bernhari a mentionné que tout ce processus, bien qu’ardu, lui a permis d’être plus humain, plus ouvert et d’apprécier davantage les autres.

Les odyssées

Parlons de l’album à venir. Les thématiques : l’exil et l’amour impossible à la In The Mood For Love. Le résultat, c’est 4 chansons : Motel Gédéon, Les Palmiers Bleus, Rien ne meurt sous les étoiles ainsi que l’éponyme Les Odyssées. Les deux premières sont déjà sorties, accompagnées de clips. Par le passé, l’amateur de cinéma a déjà fait des vidéoclips plus léchés. On sent plutôt ici un rapport de proximité entre le créateur, Bernhari, et le médium alors qu’il occupe la place centrale dans les deux réalisations. La première a été co-déployée avec Hraïr Hratchian en déambulation à Paris et la seconde, improvisée en solo lors d’un voyage en Espagne. Ce dernier a donc affirmé que l’indépendance mentionnée plus haut se reflète aussi bien dans sa manière d’aborder l’image.

Questionné sur son processus de création, il a renchéri en évoquant : « le goût de l’aventure et le fait de m’être mis dans cette position de danger-là, ç’a grandement fait partie du processus créatif ». Ayant longtemps mis l’accent sur la musique, Bernhari n’a, avant ses 30 ans, pas trop voyagé. Mais voici que ses voiles ont pris du millage en Europe, continent qui, depuis plusieurs années, lui donne envie et lui permet de tout découvrir.

Voir l’ailleurs, et tout ce qui vient avec a été une source d’inspiration, mais comment explique-t-il davantage la raison de son ensemble généralement plus rythmé que les précédents. Tout part de sa collaboration avec Feu! Chatterton, des musiciens ayant une « intelligence pop même s’ils font du rock, […] une intelligence de la construction des chansons. C’est une école depuis que je travaille avec eux ». Là-dessus : « avec Clément Doumic, […], on s’est assis, on a regardé les chansons, on a retravaillé les choses ensemble, on a regardé les arrangements, et puis on s’est préparé au maximum jusqu’à ce que le groupe nous rejoigne. […] C’est né en studio ». Somme toute, Alexandre Bernhari affirme que c’est ainsi que son EP s’est ouvert, lequel il trouve plus évolué que ses précédentes propositions. Il renchérit en évoquant que ses camarades « ont emmené une énergie de l’aventure, du voyage; une énergie qu’on entend dans la basse et la batterie d’Antoine Wilson et de Raphaël De Pressigny ».

Les Odyssées, c’est donc un projet issu de collaborations toutes naturelles entre amis musiciens. Et apparemment que ce ne serait que le début : « On a fait beaucoup de choses. Est-ce que ça va voir le jour bientôt ou pas bientôt, je ne sais pas ». Une chose à la fois, dira-t-on!

Les odysées de Bernhari sera disponible le vendredi 22 mars.

Crédit photo: Clément Doumic