Critiques

Mark Lanegan & Duke Garwood

With Animals

  • Heavenly Recordings
  • 2018
  • 38 minutes
7,5

Quand Mark Lanegan fait paraître un nouvel album, on est habituellement preneur. On adore le timbre de voix « qui a du vécu » du chanteur. En mode Mark Lanegan Band, le vétéran a fait paraître trois excellents disques au cours des dernières années : Black Funeral (2012), Phantom Radio (2014) et l’électro-rock assumé, intitulé Gargoyle (2017). Quand il s’associe avec le doué guitariste et multi-instrumentiste Duke Garwood, les résultats sont tout aussi probants. Black Pudding, album paru en 2013, est une épopée blues rock psychédélique sensuelle et langoureuse totalement réussie. La semaine dernière, nos deux spleenétiques favoris s’associaient de nouveau pour nous offrir With Animals; disque enregistré en alternance au domicile londonien de Garwood et celui de Lanegan à LA.

Puisque Garwood est un musicien qui refuse le surplace, on assiste à une certaine mutation de la direction sonore habituelle embrassée par l’artiste. À l’évidence, le blues rock désertique constitue toujours la marque de commerce de Garwood, mais cette fois-ci, l’Anglais a eu l’audace de plonger ses motifs de guitares dans une panoplie d’effets, comme si la musique électronique s’initiait au blues.

Dans cette subtile réorganisation sonore, il s’efforce d’épurer ses chansons de toutes fioritures sonores inutiles. On se retrouve avec 12 superbes chansons minimalistes qui vont à l’essentiel et qui sont magnifiquement bonifiées par l’interprétation sentie de Lanegan. Évidemment, nous sommes dans un registre résolument mature et contemplatif, aux antipodes de l’hyperactivité généralisée qui prévaut actuellement dans nos modes de vie dits « productifs »…

En création, on peut se positionner parfaitement en phase avec son époque ou encore être quelque peu indifférents aux tendances. Garwood et Lanegan adoptent une posture traditionaliste, tout en ayant l’intelligence d’insuffler une juste dose de modernité à leurs chansons. Ça donne un disque intemporel qui sera encore pertinent dans 10 ou 20 ans.

Ça s’écoute d’un seul trait, mais quelques pièces ressortent quand même du lot : l’introductive Save Me donne admirablement bien le ton, l’émouvante My Shadow Life est une franche déclaration d’amour envers une attirance interdite, enfouie secrètement dans la tête et le coeur de Lanegan (on comprend !), la boucle rythmique dans Feast to Famine est franchement lascive, le folk Upon Doing Something Wrong est une demande de pardon à une femme que le chanteur a profondément aimée et le sifflotement de Lanegan dans la conclusion de Lonesome Infidel est magnifiquement étrange. Pas de doute, c’est avec Garwood que Lanegan est présentement à son mieux.

On recommande donc ce With Animals aux esseulés, aux amoureux déçus ainsi qu’à tous ces insomniaques submergés par le doute et le remord à la tombée du jour. Ils y trouveront un magnifique refuge en attendant de jours meilleurs.

 

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