Critiques

Grant Lee Phillips

The Narrows

  • Yep Roc Records
  • 2016
  • 55 minutes
7

Grant-Lee PhillipsNous avions mis de côté Grant-Lee Phillips depuis quelques années. Non pas que sa démarche n’était plus pertinente, mais plutôt parce qu’on avait l’impression que l’Américain avait fait le tour de son jardin musical.

Mais voilà que nous arrive The Narrows, un album à la plume renouvelée dans l’encrier ancestral et qui permet un retour à la musique du troubadour californien.

De descendance amérindienne, Grant-Lee Phillips a que trop rarement évoqué ce passé atypique. On le connaît davantage pour son penchant folk rock urbain, où les histoires – souvent noires, amères et introspectives – se déroulent dans un Los Angeles sale et poussiéreux, ou encore sur une route bordant le Pacifique, au coucher du soleil, le protagoniste quittant ou cherchant un amour impossible.

Du déjà entendu, n’est-ce pas ?

Mais Grant-Lee réussissait tout de même à nous émouvoir et à sortir du lot, trouvant cette corde – de guitare – sensible qu’il faisait vibrer et résonner à l’aide d’une touche alt-country typée et d’une vocalise précise et sentie. Cet amalgame lui a permis à la fin du siècle dernier de marcher dans un chemin de l’industrie musicale certes moins fréquenté et moins populaire, mais plus authentique: l’americana.

Vingt-cinq ans plus tard, après avoir traversé les époques et les modes, après avoir survécu «avec succès» à la dissolution de son groupe Grant Lee Buffalo, avec lequel il a enregistré quatre albums au début/milieu des années 90, et après avoir récemment quitté Los Angeles pour s’installer à Nashville au Tennessee, nous arrive son 8e album solo, The Narrows.

Et si, comme nous l’écrivions plus haut, le travail du chanteur de 53 ans semblait moins inspiré sur les deux albums qui ont suivi l’excellent Strangelet sorti en 2007, il retrouve ici une verve heureuse. Le déménagement a de toute évidence porté ses fruits !

L’héritage comme point d’ancrage, il aborde encore une fois son passé. Comme sur l’album précédent, Walking In The Green Corn, il évoque celui de ses ancêtres amérindiens disparus, perdus et dilués dans une modernité américaine dont il ne se réclame aucunement:

«In the winter when the birds don’t sing, that’s when I lost my home, when I lost everything, kept a’ walkin’ till my feet were bloody, left everything we knew, when they took us ‘cross the Mississippi, nothin’ that I could do» – Cry, Cry

Il parle également d’événements plus récents, notamment de la mort de son père survenue durant l’enregistrement de l’album:

«Come one day, when these bones give way, gonna’ call my name, and I will depart, Come that day, I won’t be afraid, I’ll rise from the flames, like smoke and sparks» – Smoke And Sparks

Enregistré dans le studio de Dan Auerbach (The Black Keys), le nouvel album de Grant Lee Phillips est, écrivons-le, musicalement «limité»: les sonorités exploitées sont connues et manquent d’originalité. Mais au final, cela importe peu, puisqu’à l’image d’un Neil Young, c’est plutôt dans les textes que l’auditeur curieux doit plonger; il en ressortira alors avec cette certitude d’être en présence d’un auteur-compositeur accompli.

Ma note: 7/10

Grant Lee Phillips
The Narrows
Yep Roc Records
55 minutes

http://www.grantleephillips.com/

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=GxZcN5IxDaw[/youtube]

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