Critiques

Orelsan

Civilisation

  • Wagram Music
  • 2021
  • 58 minutes
6

On est habitué à voir OrelSan débarquer avec ses gros sabots et offrir des lignes fortes qui rentrent dans le tas. En 2017, le rappeur français avait frappé le grand chelem avec La fête est finie où il offrait des pièces coup de poing en raison de sa plume aiguisée. Celui-ci lui avait aussi valu un disque diamant, en plus de se mériter un prix aux Victoires de la musique.

Avec Civilisation, OrelSan propose un album qui flotte entre la sphère sociale et des moments d’intimités. Le truc, c’est que trop souvent, la nostalgie prend aussi une voie un peu molle et la trame sent le réchauffé. Heureusement, quelques moments d’excitations sauvent ce quatrième album du rappeur français.

Commençons avec les bons côtés. La trame parfaitement dosée de L’odeur de l’essence soutient à merveille les paroles acides d’OrelSan qui dénonce les extraits et la tendance sociale à se cambrer avec sa tribu pour dominer les autres. Un texte qui frappe sur un peu tout le monde avec justesse et de bonnes rimes. C’est l’un des moments inspirants de Civilisation. La palme du texte suprême revient par contre à Baise le monde qui commence comme une chanson de brag-rap et qui revient toujours à la réalité des aboutissements de chacun des gestes. 

Je pensais jamais rentrer dans des soirées select
Open bar, j’me sers un toast avec une grosse crevette
Pêchée par un chalutier à l’est de Madagascar
Qui détruit la barrière de corail sur son passage
Qui fait que les pêcheurs ont plus de travail
Ils ramènent rien aux villageois qu’ont plus rien à graille
Vu qu’leurs crevettes sont devant moi
Euh, pourquoi je pense à ça? C’est pas l’moment

Baise le monde

Sa façon d’approcher la vie des gens nantis qui oublient d’où vient leur mode de vie est franchement intéressante. Le tout est fait avec une trame, signée Skread, qui suit ses changements d’humeurs. On retrouve aussi le duo de Casseurs Flowters sur Casseurs Flowters Infinity qui bien sûr est composé par Skread aussi. Ce n’est pas la seule collaboration, alors que les Neptunes rejoignent le rappeur sur l’efficace Dernier verre

S’il y a ces bons coups sur Civilisation, il y a aussi des moments décevants. Ça commence dès les premières notes de Shonen. On y retrouve un piano lent et mélancolique à souhait qui met déjà de l’avant un sentiment de nostalgie qui restera sur de nombreuses pièces. C’est du déjà vu et ça sent le réchauffé. Ça se poursuit sur la deuxième, La quête, avec un échantillon d’une boite à musique pour chanter une chanson sur la jeunesse. Ne manque qu’un xylophone pour enfant et on aurait la totale. De plus, les textes ne sont pas particulièrement inspirés.

Du propre essaie de mettre de l’avant une trame entraînante à la Magic System, mais sans le réel entrain contagieux de la formation ivoirienne. Bébéboa a un thème intéressant, mais la façon de le livrer n’est pas des plus efficaces. Manifeste raconte une sortie dans une manifestation, mais avec une livraison slam plus que rap. Malheureusement, la pièce même si elle s’améliore au fur et à mesure tombe quand même à plat.

Bref, il y a du bon et du mauvais sur Civilisation. OrelSan ne rate pas tout, mais on est loin des meilleurs moments de sa discographie où sa plume acérée trouvait le moyen d’agir comme un scalpel pour découper la couche superficielle de notre société pour explorer ce qu’il y avait sous le capot.

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