Osheaga 2019 jour 1 : Flume, The Lumineers, Denzel Curry et + encore
Le jour 1 d’Osheaga en a fait voir de toutes les couleurs aux milliers de personnes qui se sont déplacés d’un peu partout pour voir leurs artistes favoris et malgré l’absence de Jessie Reyes et de J Balvin, deux artistes grandement attendus, l’ambiance était au rendez-vous pour servir à merveille les intérêts de tout un chacun.
De retour sur le site principal du Parc Jean-Drapeau après deux ans d’absence, il faisait bon de retrouver le lieu qui a fait naître l’événement il y a presque 14 ans déjà. Parmi les spectacles couverts, plusieurs surprises et quelques déceptions ont parsemé ceux qui ont plus que répondu aux attentes, mélange favorable pour souligner un premier tiers des plus réussis.
Laura Escudé, Naya Ali et St. Paul & The Broken Bones
En début d’après-midi, alors que le soleil plombait déjà sur l’ensemble du site, le choix s’est arrêté sur Laura Escudé et son style futuriste classique pour entamer la journée à la Scène de l’île. C’est devant une foule qui ne s’est pas empressée de venir dès les premiers instants qu’Escudé a offert une performance inspirée. Fidèle à elle-même, avec ses nombreuses modifications de voix, on a vu la première formatrice certifiée d’Ableton mettre en boucle des solos de violons, mélangés avec des compositions personnelles, par moment improvisé, pour nous plonger dans un univers électronique hors du commun.
En partant une vingtaine de minutes avant la fin, question d’être bien placé pour la performance de Naya Ali, j’ai pu assister au passage aux dernières chansons de Bayonne. Le groupe a offert une fin de prestation bien intéressante avec la touche pop, parfois rock, estivale harmonieuse de son plus récent album Drastic Measures.
Il faut être dans l’optique de voir une femme inarrêtable monter sur scène pour se fondre complètement dans la performance de Naya Ali. La rappeuse montréalaise n’a pas cessé de répéter qu’elle venait écrire une page d’histoire et si ce n’était pas du problème de son rencontré lors de ce moment de gloire, on lui aurait donné raison. Malgré tout, la prestance sur scène de la chanteuse au style agressif et aux lourdes productions musicales a impressionné, déplaçant suffisamment d’air pour former une tornade trap bien accueillie à la Scène Verte.
Il aura fallu courir pour coordonner la fin d’Ali et les débuts de St. Paul & The Broken Bones. Les 8 hommes qui composent le groupe mettant à l’avant-scène le chanteur Paul Janeway étaient tous vêtus d’un imperméable blanc pour l’occasion, petit problème avec Delta Airlines semble-t-il. Blague ou pas, le groupe a conservé un sérieux irréprochable en y allant de leur groove inspiré habituel, un mélange sonore contemporain extrêmement varié qui se marie avec la voix et les paroles du chanteur. Il y avait beaucoup de ressentis, le groupe de musiciens étant capable de partir dans tous les sens pour capter chaque corde émotionnelle. Beau tour de force du groupe de l’Alabama à la Scène de la Rivière.
JPEGMAFIA, Denzel Curry, Nombe et Gucci Mane
Tout comme Naya Ali, JPEGMAFIA, que tous surnomment Peggy, présente un style bien singulier et dans son cas surtout très avant-gardiste. Naviguant à travers plusieurs styles dont l’électro, tout en conservant son fond de rappeur, on l’a vu dégager une énergie agressive impressionnante. De nombreux mosh pits se sont créés, histoire de catalyser la chaleur solaire et musicale au même endroit. Le surprenant artiste de Baltimore a offert une palette sonore à la hauteur de ses louanges, figurant parmi les surprises de cette première journée de festival avec son passage à la Scène Verte. Damn Peggy!
Si mon envie de bains de foule s’était activée lors de la performance de JPEGMAFIA, on peut dire qu’elle s’est concrétisée à fond lors du passage de Denzel Curry à la Scène de la Rivière. Le jeune et intelligent rappeur floridien débarquait à Montréal au plus fort de son nouvel album ZUU. Malgré plusieurs moments forts où on a vu la foule s’animer et se perdre dans les grosses productions trap du chanteur, la performance manquait d’inspiration. Alors que la plupart ne connaissent pas les paroles des chansons de Curry, s’attardant plus à sa production sonore, cela a donné plusieurs creux moins intéressants. Malgré sa popularité grandissante depuis quelques années et sans rien enlever à Curry, il aurait été préférable de le voir sur une scène plus petite, question d’accroître la proximité entre le chanteur et les vrais amateurs.
Note de LP Labrèche : pendant ce temps, j’étais du côté de la Scène de la Vallée pour voir Sharon Van Etten nous livrer une bonne partie des pièces de son excellent dernier album, Remind Me Tomorrow. Van Etten possède une voix incroyable et puissante. On la sent souvent retenue et lorsqu’elle lâche la bride ça vous hérisse le poil sur les bras. I Told You Everything, Comeback Kid, You Shadow et Seventeen y ont toutes passées. Mais c’est la magnifique Everytime the Sun Comes Up qui a été le moment le plus fort de la performance. Puis, je suis passé du côté des deux scènes principales pour Rosalía et Interpol. La première a offert une performance décousue et c’est très décevant en prenant compte l’excellent El Mal Querer qu’elle a lancé l’an dernier. Il faut dire qu’elle n’était pas aidée par la sonorisation déficiente. On peinait à entendre la moitié de ses paroles. On pourrait dire la même chose du côté d’Interpol qui n’avait pas le kick qu’ils auraient dû avoir. Gang, on rajoute un bon 10 décibels à tout. Fin de la parenthèse.
Pour ce premier arrêt à la Scène des Arbres, j’ai eu la chance d’assister à la rafraîchissante performance de NoMBe. Alors qu’on tourne les pages de son journal intime en écoutant son premier album, on ressent toute l’énergie du jeune allemand pour succomber à ses paroles et à son électrisante performance ainsi qu’à celle de ses musiciens. C’est de la musique parfaite pour ce temps de l’année, plaisant à une grande majorité pour créer un public hétérogène tout sourire qui a sans doute tout été agréablement surpris par ce qui s’est déroulé devant pendant un peu moins d’une heure.
Malheureusement , j’ai manqué Mick Jenkins. Celui qui est venu en renfort à Jessie Reyez a sans doute offert un sacré moment à ceux qui y étaient. Arrivé à temps pour Gucci Mane, c’était le parfait moment pour faire la file et manger un morceau. Gucci Mane étant Gucci Mane, il n’a pas offert quelque chose de satisfaisant pour saisir une réelle attention. Malgré de bonnes performances en studio, il manquait résolument d’éclat en spectacle. La foule entassée pour le voir pourra majoritairement s’entendre sur le fait que ce n’est pas celui qui aura le plus retenu l’attention, préférant dire l’avoir vu que d’avoir apprécié sa prestation.
Joji, Flume et The Lumineers
Mon cerveau déjà bien nourri par une diversité musicale des plus satisfaisante, j’étais prêt à m’adonner pleinement aux quelques spectacles qui clôturaient cette première journée. Joji, jeune musicien japonais, est sans l’ombre d’un doute aussi intéressant à voir qu’à entendre. Il aura été facile d’entrer dans sa bulle tantôt mélancolique, tantôt euphorique, teintée par une sonorité éclatée. Celui qui fait fureur sur le web a transmis cette belle énergie sur scène et avec ses lunettes qui ressemblent à celles que portent les cyclistes, il nous a fait pédaler dans le plaisir de ses tempos lents et de sa voix mélodieuse, cette fois-ci dans une douce danse au coucher du soleil à la Scène de la Vallée.
Arrivé juste à temps pour capter la fin de Francis and The Lights, j’ai senti beaucoup de fébrilité dans l’air et tout comme NoMBe plus tôt, l’énergie de l’aura estivale était au rendez-vous pour faire danser et chanter en coeur la masse sous le chapiteau.
Note de LP Labrèche: pendant ce temps, j’étais du côté de Mitski qui nous a livré ses chansons avec un aplomb impressionnant. La jeune femme maîtrise sa voix de manière incroyable. Elle a livré les grosses chansons de son dernier album, Be the Cowboy, dont Geyser, Nobody, Washing Machine Heart et Old Friend. Elle a aussi ajouté Your Best American Girl, First Love / Late Spring et Francis Forever. C’était très satisfaisant. Elle était aussi accompagnée d’une chaise et d’une table avec lesquelles elle dansait du début à la fin. Même si ça avait parfois les allures d’audition pour une école de danse contemporaine, elle a maximisé leur apport. Au moins, ce n’était pas là pour rien. Fin de la parenthèse.
En voyant arriver les deux cerises sur le sundae de la première journée d’Osheaga, l’excitation était au rendez-vous. C’est fou de voir la capacité des gens à se déplacer à travers une foule aussi nombreuse. Faufilé dans la fourmilière de gens qui attendaient impatiemment Flume, j’ai ressenti à nouveau l’invitante fébrilité s’installer. On peut dire que ce sentiment général ne s’est pas assoupi avant la fin de la soirée. Plus qu’une simple performance, Flume a offert un moment inoubliable en construisant un morceau d’art sur scène pour présenter son mixtape Hi this is Flume.
Hypnotisé, le public était marionnette de sa musique et de ses actions, contrôlé par l’aisance des transitions en plus d’être en totale euphorie même dans la noirceur. Malgré un lent début avant Never Be Like You, on peut dire que Flume a surpassé les attentes, créant une atmosphère qui a permis de s’immiscer à fond dans sa musique et oublier tout le reste. Les nombreux chanteurs invités l’ont d’ailleurs aidé à mettre le feu dans la place, alors qu’on se sentait autant au festival que dans son studio tellement le ressenti musical était à point.
Clôturer la première journée sur The Lumineers, c’était un rêve qui devenait réalité. Bien sûr, en se rendant compte de tous ces bons artistes qu’on a manqué au courant de la journée, on obtient une légère déception. Heureusement, tous ces moments de bonheur ressenti lors des artistes qu’on prend le temps d’apprécier viennent couvrir tout le reste. The Lumineers s’est d’ailleurs assuré de conserver l’euphorie à l’avant-plan en offrant un moment folk rayonnant. En se déplaçant le temps de quelques chansons sur la petite scène située devant la grande, ils ont créé une proximité s’apparentant à celle d’un catwalk. Cette proximité a d’ailleurs été l’un des moments mémorables de cette journée festive, alors que le groupe a joué ses plus grands classiques tout comme une multitude de chansons qui normalement passeraient sous le radar et qui ont cette fois-ci écarquillé bien des yeux et en fait chanteur plus d’un.
À travers les bains de foule, les nombreux déplacements et une liste de spectacle vu qui se conservera en mémoire très longtemps, on oublie les petits accrochages sonores de certaines scènes et des quelques artistes qui n’ont sans doute pas donné le meilleur d’eux-mêmes. Somme toute, on peut dire : mission accomplie à l’organisation du festival qui a déniché un bel amalgame pour concevoir une première journée de festival plus que captivante.
Pour plus d’informations sur la programmation d’hier ou pour voir ce qui s’en vient, c’est par ici que ça se passe.