Critiques

Mclean

Une dernière fois

  • JKB / Productions Never Ending
  • 2018
  • 39 minutes
7

Lancé le 17 août dernier au festival Up Here à Sudbury, Une dernière fois est le deuxième album sous le nom de Mclean du chansonnier et multi-instrumentiste Simon Jutras, un natif de cette ville du nord de l’Ontario. Sa proposition de 2015, Sans l’abri d’un quand, passée pratiquement inaperçue au Québec, peut-être faute de promotion suffisante, aurait mérité qu’on lui accorde une plus grande attention, ne serait-ce que pour l’originalité des structures chansonnières, la richesse des arrangements et la singularité de l’univers de cet ex-étudiant en musique classique capable d’émouvoir, de faire planer et de rocker.

En cette fin d’été 2018, il serait dommage que ce soit la dernière fois, comme peut le suggérer le titre de son dernier-né, que nous entendions parler de cet artiste admirateur des compositeurs Henri Pousseur et Krzysztof Penderecki, car ses onze nouvelles chansons de « pop alternative » – étiquette proposée par Jutras il y a trois ans  – écrites en collaboration avec l’auteure Johanne Alice Côté, sont encore une fois dignes d’intérêt.

Musicalement, les compositions de Mclean – ce nom, curieux choix pour un projet en français, est une référence à un hôpital psychiatrique ayant accueilli le mathématicien John Nash et plusieurs artistes comme Sylvia Plath – font notamment penser au travail des Beatles, de Grant-Lee Phillips au temps de Mobilize ou de l’Urbain Desbois de La gravité me pèse (Une dernière fois), de Daniel Bélanger, de Blur époque 13 (Allongée sur le divan no. 2) ou encore de Midnight Oil et de Radiohead (4 000 milles). L’auditeur versé en musique classique pourrait aussi remarquer des clins d’œil à différents compositeurs, comme à l’écoute de son premier album dont la pièce Tigh Deh est construite sur le modèle d’un boléro.

Une dernière fois n’est évidemment pas sans imperfections. Sur le plan vocal, il arrive que le Franco-Ontarien manque de puissance, comme sur Le bonheur ou Le jardin de Penderecki (une belle pièce au demeurant), et l’on pourrait probablement lui reprocher deux intros légèrement « convenues » : celle de Makemake, où les « aah aah, aah aah » chantés sont un tantinet faciles (les deux dernières minutes de cette pièce sont toutefois un des moments forts de l’œuvre) et celle de Le bonheur, probablement la pièce la plus faible de l’album malgré un rap compétent de l’invité Le R Premier. Par ailleurs, les arrangements de cordes pourraient être trop présents au goût de certains.

Il reste que cet enregistrement hors mode co-réalisé avec Olivier Fairfield (batteur sur le disque et pour FET.NAT) contient plusieurs morceaux appréciables qui se bonifient au fil des auditions. Parmi ceux-ci : La pièce titre Une dernière fois (qui pourrait tourner sur les ondes d’une radio universitaire aussi bien qu’à votre chaîne « adulte contemporain » préférée), la bilingue et dansante En passant et la stimulante Stalker, qui évoque non pas les agissements d’un individu inquiétant sur les réseaux sociaux, mais plutôt le fameux film du cinéaste Andreï Tarkovski. À souligner aussi : la pochette réussie (inspirée de Magritte et de Chirico?) signée Christian Pelletier et Ali Rodriguez ainsi que la qualité de la prise de son de Sébastien Perry et de Stéphane Rancourt. C’est à écouter donc, comme le sont les plus récents titres d’autres musiciens de Sainte-Anne-des-Pins tels Marie-Claire et Antoine Tremblay Beaulieu.

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