Critiques

Titus Andronicus

An Obelisk

  • Merge Records
  • 2019
  • 38 minutes
7

L’an dernier, la formation punk prolétaire Titus Andronicus nous avait proposé A Productive Cough; disque que l’on pouvait catégoriser dans le « heartland rock ». Album pas tout à fait réussi, il va sans dire. L’ADN punk rock du groupe disparaissait totalement au profit d’une approche étonnamment pépère… Pourtant, s’il y a un groupe américain qui a carburé à la colère (justifiée par ailleurs) et à l’intensité, et ce, tout au long de sa carrière, c’est bien Titus Andronicus.

Mené par l’inharmonieux Patrick Stickles, le groupe à géométrie variable a quelques très bons disques dans sa besace : l’épique The Monitor (2010) et l’opéra rock The Most Lamentable Tragedy (2015), entre autres.

Un an après A Productive Cough, Stickles et sa bande nous reviennent avec un nouvel album titré An Obelisk (référence au Washington Monument qui trône tout près de la Maison-Blanche). Cette fois-ci, Stickles s’est entouré d’une formation assez rudimentaire. Chris Wilson (batterie), RJ Gordon (basse) et Liam Betson (guitare) l’accompagnent dans cette charge abrasive contre la situation sociopolitique qui prévaut actuellement chez nos voisins du Sud. Et qui est à la réalisation ? Nul autre que le vétéran Bob Mould qui a fait paraître le très bon Sunshine Rock en tout début d’année.

Oui, Titus Andronicus effectue un retour en force avec une création qui brasse la cage sans aucun compromis. Exit les concepts ampoulés, les orchestrations « héroïques » et les structures parfois compliquées, le quatuor nous propose du punk rock énergique « drette dans notre face ». L’approche n’a rien d’original. Vous y entendrez un groupe qui assume pleinement ses références (New York Dolls, The Replacements, le rock bien graisseux du New Jersey, etc.).

Mais ce qui distingue cette production de ses semblables, c’est la sincérité avec laquelle Stickles s’exprime face à l’égoïsme et l’inertie de ses compatriotes. Impossible de rester stoïque en écoutant Stickles s’époumoner dans (I Blame) Society :

« I blame society

Society’s to blame

I claim society

Is playing a hostile game

Inside my diary

I hide my private shame

And I blame society, society

Society’s to blame »

(I Blame) Society

Évidemment, tout n’est pas parfait. On regrette la faute de goût qui se manifeste dans la conclusion de Hey Ma; un blues rock qui se transforme en punk celtique incluant l’habituelle cornemuse… Et c’est le seul véritable faux pas qui marque ce nouvel album.

Certains pourraient reprocher au groupe le penchant hard-rock de certaines chansons (Within the Gravitron et Troubledman Unlimited), mais les excellentes pièces aux accents punks viennent largement compenser ces petits impairs. Coup de chapeau à Beneath the Boot et surtout à la fédératrice Tumult Around the World; une sorte de Sweet Jane (classique du Velvet Underground) en mode décapant.

Sans être un retour éclatant pour Titus Andronicus, les amateurs de rock décoiffant qui va droit au but sauront apprécier ce disque à sa juste valeur.

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