Critiques

Tinariwen

Amadjar

  • Anti- Records
  • 2019
  • 54 minutes
8
Le meilleur de lca

Amadjar, ou « le visiteur inconnu » en français, voilà comment le groupe de blues touareg Tinariwen a intitulé leur nouvel album. Neuvième galette produite depuis leurs débuts qui remontent déjà aux années 80. La période d’alors était trouble. Les communautés touarègues étaient alors persécutées et certains membres du groupe avaient pris les armes pour défendre leur territoire, leurs droits. Familiers de la douleur, chantant l’espoir, les musiciens créent avec leurs guitares et leurs voix des paysages où l’on peut se demander qui nous sommes. Dans un voyage introspectif, Tinariwen nous invite à les suivre.

« Oh love, dreaming of your tale has exhausted me.

I have no hate left for anyone; my soul is confused.

I believe in no one now.

I’ve become the son of gazelles, who grew up in the meanderings of the desert ».

Extrait traduit de Tenere Maloulat

C’est sur la route qu’Amadjar a été réalisé. En dignes musiciens nomades, le groupe s’est déplacé dans le Sahara de l’Ouest avec leur tente et leurs instruments. Plusieurs des enregistrements donnent l’impression d’avoir été captés au début de l’embrasement du feu de camp (Zawal, Takount) tandis que certaines sont plongées dans la pénombre des dernières braises (Amalouna). L’impression d’être sous la tente de cette caravane musicale est frappante en écoutant Iklam Dglour qui se conclut par une discussion des membres du groupe, alors que Wartilla se termine avec des accords improvisés.

L’atmosphère intime de l’album capté avec simplicité est habilement rehaussée par plusieurs artistes invités par le groupe qu’ils rencontrent sous la tente ou en studios. Noura Mint Seymali, Warren Ellis, Cass McCombs et Micah Nelson contribuent très simplement à l’univers psychédélique des nomades. Une des forces du groupe est d’ailleurs d’imbriquer parfaitement leurs invités à leurs idées respectives. L’identité de Tinariwen est toujours fortement reconnaissable, tout en étant renouvelée par le violon d’Ellis, la voix de McCombs ou la guitare de Stephen O’Malley. Du travail collaboratif de haut niveau où s’effacent les égos.

Amadjar est un album que l’on accueille dans notre quotidien avec plaisir. Si l’offrande était un homme ou une femme, dans leurs regards, il y aurait une tristesse. En répétant des mots qui pourraient passer pour des notes, des rythmes, ils nous raconteraient une vie. La leur, celle de ceux et celles ayant partagé leur quotidien. En treize pièces, Tinariwen propose une atmosphère propice à la contemplation. Un album d’une grande beauté.   

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