L’auteur-compositeur-interprète Thierry Larose s’est fait connaître en participant à l’édition 2019 des Francouvertes, mais il a surtout conquis un public plus nombreux avec la parution de Cantalou (2021), son excellent premier album. Sur ce premier effort, même si l’influence de la formation Malajube prédominait par moments, on pouvait aisément percevoir l’immense talent de compositeur, de parolier et de mélodiste qui l’habite.

Au cours des deux dernières années, il a présenté ses propres chansons dans de nombreux concerts, en plus de faire partie du groupe accompagnateur de l’incandescente Lou-Adrianne Cassidy, privilégiant ainsi le dur labeur à la facilité. C’est dans ce contexte bouillonnant que l’artiste a écrit et composé les nouvelles pièces de son nouvel album.

Enregistré entre tous ces spectacles, et dans six studios différents, Sprint! élargit de manière significative la palette sonore que Larose exhibait sur Cantalou. Ainsi, il garde intact son pop-rock lettré, et mélodiquement raffiné, tout en y greffant des moments inspirés par la bossa-nova (Comme dans mes souvenirs), par la new wave des années 80 (Des nœuds dans les doigts), le folk rock « dylanesque » (Portrait d’une Marianne) et le jazz-pop domestiqué (Frisbee & marmelade).

Beaucoup de chansons ont, semble-t-il, été enregistrées en une seule prise, sans l’aide d’aucun métronome. Voilà une excellente indication du boulot remarquable accompli par les accompagnateurs de Larose : le coréalisateur de l’album Alexandre Martel (guitares), Sam Beaulé (basse), Charles-Antoine Olivier (batterie) et, bien sûr, Lou-Adrianne Cassidy (chœurs). Sprint! est musicalement vivant et ce n’est pas étranger à la contribution de tous ces talentueux instrumentistes susmentionnés.

Évidemment, Thierry Larose est un jeune parolier, talentueux certes, mais qui a des préoccupations d’un jeune vingtenaire. Cependant, l’artiste est loin d’être centré sur lui-même. Dans Portrait d’une Marianne, il se met dans la peau d’une jeune femme obligatoirement barricadée. Un subtil clin d’œil aux confinements pandémiques :

Une année cloîtrée lentement se dessine à l’horizon

Alors que ton destin

C’est de l’intérieur que tu le forges

– Portrait d’une Marianne

Dans l’émouvante, dépouillée et conclusive Baleine et moi (take 3), l’auteur, déjà à son âge, a bien compris que le moment présent est la priorité suprême de nos petites existences; importance qui va bien au-delà des ruminations et anticipations que génèrent nos esprits…

Et tout devient tellement précieux

Quand y’en reste moins à gaspiller

Toutes mes joies, toutes mes peines

Je ne veux plus les oublier

– Baleine et moi (take 3)

On pourrait reprocher à ce Sprint! son éclectisme stylistique. Or, le liant de ce plaisir qu’ont eu Larose et ses accompagnateurs à explorer tous ces genres musicaux est sans contredit l’affection que l’auteur-compositeur lui-même porte au pop-rock. En fait, l’artiste a maintenant une identité sonore tellement forte que celle-ci transcendera tous les styles qu’il voudra expérimenter à l’avenir.

L’auteur de ces lignes a bien sûr une préférence pour les pièces plus « décapantes ». On retrouve avec joie l’ascendant « malajubien » dans Cœur de lion. On salue l’apport vocal de Lou-Adrianne Cassidy dans Si tu comprends pas maintenant (tu comprendras jamais). Plein prix est une chanson pop-rock de grande qualité et le refrain de Demain, Demain est mémorable.

Avec Sprint!, Thierry Larose fait un pas de plus vers une reconnaissance accrue, et ce, sans perdre une seule once de son identité et de son intégrité. Une longue carrière l’attend, celui-là.