Critiques

Technicolor Blood

Technicolor Blood

  • Les disques Le Backstore
  • 2021
  • 29 minutes
7

Les vétérans de Technicolor Blood ont roulé leurs bosses respectives pendant plusieurs années au sein de quelques formations montréalaises. Après la sortie de deux 45-tours (oui, vous avez bien lu!) en 2018 et 2019, Marty (voix, guitare, synthétiseurs), Boredom L (basse, synthétiseurs), Carl Ulrich (batterie) et Spacy Steph (guitare) nous proposent aujourd’hui même un premier long format homonyme.

Enregistré de manière totalement indépendante sous la supervision du chanteur-guitariste Marty, distribué par Les disques Le Backstore – qui est aussi un disquaire montréalais fort respectable – Technicolor Blood présente une entrée en matière officielle assez convaincante. Humant les effluves d’un space rock « à la Hawkwind », le groupe ajoute à son bouquet quelques ornements inspirés du post-punk. C’est dans le jeu de basse de Boredom L que s’incarne cette subtile intrusion. Les quelques riffs inhalant les parfums narcotiques du stoner rock et du psychédélisme viennent mettre un point d’exclamation à la recette sonore de la formation.

Ce qui singularise l’approche sonore de Technicolor Blood est sans contredit l’utilisation de tous ces claviers et synthétiseurs qui catapultent l’auditeur dans un espace immatériel. La section rythmique, carrément métronomique, les riffs abrasifs et la voix néandertalienne de Marty maintiennent notre esprit dans une « certaine lucidité ». Au fond, Technicolor Blood est la somme des influences intégrées par ses membres pendant toutes ces années de galère.

Sur Never Command, les vieux routiers nous conduisent vers une sorte de blues rock lourd et spacieux à la fois. Dans Last Night, l’aura post-punk prédomine grâce aux textures de guitares qui évoquent le jeu de feu John McGeoch; guitariste trop méconnu qui a œuvré au sein de Siouxsie and the Banshees, Magazine et Public Image Limited.

L’irruption inopinée de l’harmonica dans Prisoner étonne et procure un soupçon de chaleur à la chanson. Deux pièces portent également les stigmates de King Gizzard and the Lizard Wizard, mais en mode assagi : la guitare arabisante dans Sonic Space Sister est d’une efficacité redoutable et le penchant punk psychédélique de War on Terror est percutant.

Technicolor Blood nous escorte dans un périple sonore très peu exploité au Québec. Oscillant entre l’abrasif et l’aérien, assumant parfaitement l’influence déterminante d’Hawkwind, il ne manque qu’une réalisation plus étoffée pour que la formation dessuinte encore plus d’oreilles. Avec des moyens plus considérables, tout en conservant ce son glauque et encrassé, ce space rock massif et psychédélique pourrait prendre de l’ampleur.

Amateurs du genre, n’hésitez pas une seule seconde à plonger dans l’univers de Technicolor Blood. À écouter en ingérant modérément des substances illicites douces ou hallucinogènes… si votre état d’esprit le permet bien entendu.