Critiques

Peter Matthew Bauer

Flowers

  • Fortune Tellers Music
  • 2022
  • 34 minutes
7,5

Ce multi-instrumentiste est un auteur-compositeur mésestimé qui n’obtient pas la même attention que son ex-partenaire chez les Walkmen, Hamilton Leithauser. Comme vous le savez probablement, The Walkmen est un important groupe indie rock américain en hiatus quasi permanent depuis 2014. La même année, il nous proposait un excellent album aux accents folk rock psychédéliques intitulé Liberation! ; une allusion à peine voilée à la dissolution des Walkmen. Trois ans plus tard, Peter Matthew Bauer récidivait avec Mount QAF (Divine Love) ; une création portant sur les amours « ésotériques » de l’artiste, lui qui est un grand adepte d’astrologie.

Cinq après la sortie du long format susmentionné, il revient avec un nouvel opus titré Flowers. Démarré dans le studio maison du compositeur situé à Los Angeles, Bauer a terminé l’enregistrement de son troisième opus en carrière à Philadelphie au studio de son bon ami et comparse au sein des Walkmen, le batteur Matt Berrick. Ce qui devait être un disque conçu en mode esseulé s’est donc achevé avec l’aide d’une équipe complète. Le bassiste de la formation Liily, Charlie Anastasis, s’est joint à Bauer et Berrick. L’épouse du songwriter, Hilary Ashen, a prêté sa voix sur quelques chansons.

Au cours des dernières années, Peter Matthew Bauer a dû faire le deuil de quelques amis et parents décédés subitement, ce qui l’a poussé à effectuer un ménage parmi certains de ses « contacts » qui ont manqué d’empathie à son endroit en ignorant l’affliction qui l’a accablée durant cette période difficile.

Musicalement, des changements notables sont perceptibles dès les premières écoutes pour ceux qui connaissent assez bien l’artiste. Cette fois-ci, Bauer laisse en plan les effluves psychédéliques qui le distinguaient de ses semblables, préférant miser sur l’émotion pure de ses chansons. Puisqu’il est un musicien doué, l’abandon des atmosphères narcotiques, qu’il arborait sur ses albums précédents, ne cause aucun préjudice aux morceaux de ce Flowers.

Et ça débute avec un titre assez consensuel aux accents folk rock évoquant les refrains choraux en vogue au milieu de la décennie 2000-2010. Mais Knife Fighter n’est pas un indicateur tout à fait clair de la direction sonore qui est emprunté sur ce disque. Par la suite, ça se précise avec l’un des meilleurs morceaux de ce Flowers. Skulls mise sur une introduction batterie-orgue Farfisa, sur un jeu de basse inventif ainsi que sur le premier solo de guitare de la carrière de Bauer.

La pièce-titre, elle, évoque les influences caribéennes des chansons de Paul Simon, mais en nettement moins dociles. 21st Century Station remémore le rock’n’roll des années 50 grâce à la guitare rythmique de Bauer. Mountains on Mountains recèle l’écho encore pas si lointain des Walkmen, particulièrement dans le refrain choral. Bauer se gâte avec un solo de guitare aussi senti que pertinent dans East.

Or, la pièce de résistance de ce Flowers est sans contredit Chiyoda, Arkansas, Manille; une chanson portant sur les avertissements cryptiques proférés par un membre actif d’une secte qui a échangé pendant quelques jours avec Bauer sur le Web. La batterie, les synthés grandioses et les mélodies frémissantes se mélangent habilement pour former un superbe mur de son qui sert de bouclier aux délires paranoïaques de ce dévot…

Si on déplore la mise au rancart des ascendants psychédéliques qui singularisaient la musique de Peter Matthew Bauer, l’écriture chansonnière lettrée et reconnaissable de l’Américain, elle, est toujours aussi palpitante.

Encore une fois, Bauer nous présente une production à la hauteur de son enviable réputation qui, on l’espère, lui permettra de se faire connaître auprès d’un plus grand nombre de mélomanes. L’espoir fait vivre, semble-t-il…

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