N.E.R.D.
No_One Ever Really Dies
- Columbia Records
- 2017
- 51 minutes
The Truth will set you free / But first, it’ll piss off
– Lemon
Voilà ce que Pharell Williams proclame dès les premières secondes de No_one Ever Really Dies. C’est la cinquième offrande du trio qu’il forme avec Chad Hugo et Shay Haley, N.E.R.D. . L’écoute de l’album ne m’a pas choqué, j’ai plutôt eu la confirmation que la bande californienne maîtrise le format, peu importe l’époque ou les influences.
Les textes des nerds du pop-rap représentent l’ère Trumpesque. Outre les allusions à l’orange en chef, Pharell aidé de Rihanna (Lemon), Kung Fu Kenny (Don’t Don’t Do it ! – Kites) et M.I.A. (Kites) confrontent le racisme que le nouveau président encourage. Les exécutions policières injustifiées à l’encontre d’Afro-Américains animent les moments mordants de la galette.
Cependant, les revendications m’ont paru diluées par l’ADN pop du groupe. À travers des productions d’une qualité indéniable, N.E.R.D n’a jamais sonné aussi bien depuis 2008 à mon avis. Malgré l’utilisation de sonorités surexploitées, comme le trap et la musique caribéenne, les pièces où elles apparaissent me semblent rafraîchissantes. Ça impressionne. Par exemple, le “loop“ rythmé par le “stainless drum“ qui clôt Voilà m’a infecté pour le mois à venir. Je n’ai pas besoin de vaccin, je crois y être accro pour tout dire.
Williams donne l’impression d’être plus à son aise comme révolutionnaire positiviste qu’en tant que manifestant agressif. La galette respire la joie de vivre, qu’il s’agisse d’une mélodie de guitare électrique rassembleuse sur The Secret Life of Tigers ou la spiritualité magique de Lightning Fire Magic Prayer. Parfois, ça nous donne l’impression que Pharell a un peu trop aimé sa lecture du The Secret. Ça sonne mièvre, un peu naïf, mais les refrains sont tellement charmants. Parlant d’opération de charme, le long jeu se termine par Lifting You. À travers une ambiance reggae minimaliste “Rasta“ Pharell est accompagné d’Ed Sheeran pour nous assurer que tout ira bien tant que les “haters“ sont ignorés et qu’un gros joint est roulé.
La révolution ne se fera donc pas par la violence, ce qui n’empêche pas l’ironie. L’échantillonnage de la vidéo virale du rappeur Retch qui réapparaît à plusieurs reprises travers l’album (Lemon – Lightning Fire Magic Prayer – Rollinem 7’s) synthétise parfaitement le ton doux-amer de No_One Ever Really Dies. On peut prendre le “mad ethnic “ de Retch comme une boutade à la situation qui prévaut aux États-Unis ou appel à la fraternité.
Un artiste aussi populaire que Pharell Williams qui donne autant d’importance aux évènements troublants qui ont marqué les États-Unis en 2017 a des allures révolutionnaires. Le pouvoir en place se fait directement attaquer sans doute. Même avec l’aide d’artistes engagés tels que M.I.A et Kendrick Lamar ce serait étonnant que de futures émeutes soient animées par des productions fondamentalement pop. Il faut dire que Gucci Mane et Future participent également à la révolution. Pas besoin de vous dire qu’ils ne révolutionnent pas grand-chose. Aucun gouvernement n’explosera après avoir entendu No_One Ever Really Dies. Mes futures soirées festives par contre? Assurément.