Critiques

Mush

Down Tools

  • Memphis Industries
  • 2022
  • 46 minutes
6

Dans cette avalanche de groupes britanniques issus de la déferlante post-punk qui sévit depuis plusieurs années en Angleterre, le son présenté par la formation Mush diffère quelque peu de ses semblables. En fait, les quatre garçons résidents de Leeds sont beaucoup plus inspirés par une formation comme Parquet Courts ou encore par ces icônes du « slacker » rock que sont Pavement. Cette affection pour Stephen Malkmus était par ailleurs assez perceptible sur le précédent effort de la formation : Lines Redacted (2021).

Dans une entrevue accordée au magazine guitar.com, le meneur de la formation, Dan Hyndman, l’avoue. Pour ce nouvel album, il avait l’ambition de rendre ses chansons plus fluides et moins abstraites : « I think we felt we needed to loosen it up a bit on this record. There are definitely a few more laid-back tunes, we’ve always loved that kinda stuff, but I think we’ve found our feet a bit in terms of executing that kind of track in our old age».

Voilà donc un troisième album studio en trois ans pour Mush. Intitulé Down Tools, Hyndman et ses acolytes Nick Grant (basse), Phil Porter (batterie) et Myles Kirk (guitare) délaissent en quasi-totalité les effluves post-punk des deux précédents efforts pour plonger en profondeur dans l’indie-rock à la Parquet Courts/Pavement… tellement que l’identité sonore de la formation se dilue sérieusement.

On écoute Dense Traffic et on se dit que cette chanson aurait pu paraître sur le légendaire Crooked Rain, Crooked Rain (1994) de Pavement. On prête l’oreille attentivement à Burn, Suffering ! et nous voilà en plein cœur de l’album Wide Awake! (2018) de Parquet Courts. On comprend parfaitement le fait que certains ascendants peuvent influer sur le travail d’un artiste, mais cette fois-ci, Mush s’arroge carrément ces criantes influences en omettant de les triturer.

Pourtant, Dan Hyndman est un compositeur compétent et un parolier doué. On peut percevoir le talent qui l’habite dans une pièce instrumentale comme Interlude, le morceau le plus impressionnant et imposant de ce Down Tools. Or, c’est cette direction musicale qu’aurait dû emprunter Mush plutôt que nous offrir une poignée de chansons caractérisées par des refrains agaçants et hautement répétitifs, Ground Swell et la pièce-titre en tête de liste.

D’autres morceaux sont également intéressants. Le diptyque Ink Block & the Wedge — deux chansons fusionnées en une seule — se démarque par une introduction évoquant Teenage Fanclub et par sa conclusion, un peu post-punk, remémorant surtout les Pixies. Group of Death est une pièce qui dénonce les conditions de travail des ouvriers affectés à la construction des stades de soccer qui accueilleront la Coupe du Monde de football 2022 qui aura lieu au Qatar.

Malgré ces petits efforts créatifs consentis, les chansons de ce Down Tools sont trop souvent associées aux ascendants mentionnés plus haut dans le texte. Sans être une création franchement médiocre, ce disque laisse trop entrevoir les faiblesses (ou la paresse) de la formation. Est-ce le rythme de production qui est ici en cause ou est-ce que c’est ce trop grand désir de s’affranchir de cette vague post-punk qui plombe les nouvelles pièces ?

Nul ne le sait clairement, mais une chose est sûre, Mush peut faire beaucoup mieux.