Critiques

Modest Mouse

The Golden Casket

  • Epic Records
  • 2021
  • 50 minutes
7

Formée en 1993 à Issaquah dans l’état de Washington, la formation menée par Isaac Brock est l’une des pointures indie-rock parmi les plus appréciés et respectés qui soient. Les fans du groupe sont bien au fait que les albums The Moon and the Antartica (2000) et The Lonesome Crowded West (1997) sont deux intouchables dans la discographie du groupe. Malgré le virage pop-rock amorcé avec l’album Good News For People Who Love Bad News (2004) – et qui s’est concrétisé grâce à l’improbable succès Float On –, la sortie d’un album de Modest Mouse pique toujours la curiosité.

Brock aime prendre son temps entre chacune des parutions de son véhicule créatif. Après la sortie du très potable Strangers to Ourselves (2015), l’ombrageux leader laissait entendre qu’il avait accumulé beaucoup de matériel pour la sortie rapide d’un autre album, mais ces excédents n’ont pas été sélectionnés pour The Golden Casket. Brock et ses acolytes sont donc entrés en studio en compagnie de Dave Sardy (LCD Soundsystem, Johnny Cash, etc.) et de Jacknife Lee (U2, R.E.M., etc.) avec une ardoise complètement vierge… et avec l’envie de concevoir un long format dans le bonheur.

Ceux qui souhaitaient un retour aux superpositions de guitares inventives, aux rythmes déconstruits et à l’approche vocale criarde, façon Black Francis des Pixies, seront déçus. Modest Mouse est devenu une formation pop-rock… mais une excellente formation pop-rock. Pour ce premier album en six ans, Brock nous propose une toile de fond sonore foisonnante, parfois synthétique, qui met de l’avant des textes oscillant entre un optimisme étonnant et le scepticisme habituel de l’auteur. Dans Japanese Trees – une chanson typiquement Modest Mouse – c’est l’anxiété qui prédomine :

Not even guessing what your plans may be

You’re twisted and bent like a Japanese Tree

– Japanese Tree

Dans Never Fuck a Spider on the Fly, Brock exprime en une seule phrase, avec une lucidité exemplaire, la désaffection des électeurs envers cette démocratie trop souvent élitiste :

I don’t care for politics

And it doesn’t care for me

– Never Fuck a Spider on the Fly

Toujours aussi chargées et bourratives, les chansons de Modest Mouse exigent un effort d’écoute poussé de la part de l’auditeur. Ce nouvel album est taillé sur mesure pour les festivals à venir tant il est superbement réalisé, méticuleusement construit et étonnamment dynamique. Même si la bande à Brock assume son penchant rassembleur, il y a assez de tension et d’intensité pour que The Golden Casket soit considéré comme un vrai disque de rock.

Un seul reproche assombrit cette appréciation : l’alternance manifeste entre les chansons ensoleillées et celles plus obscures amoindrit le plaisir d’écoute. Qu’à cela ne tienne, Modest Mouse nous propose quelques moments grisants : la « radio friendly » We Are Between, le penchant post-punk entendu dans Walking and Running et les percussions en toc dans la mélancolique Lace Your Shoes, entre autres.

Modest Mouse n’a pas à rougir de l’effort créatif fourni pour cette nouvelle production. L’énergie fantaisiste et les fragments de styles éclectiques qui ont fait la renommée du groupe sont présents. En dépit de la démarche fédératrice parfaitement endossée par Isaac Brock, The Golden Casket est un disque de pop-rock « différent ». Chose assez rare de nos jours.

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