Critiques

Lambchop

The Bible

  • Merge Records
  • 2022
  • 50 minutes
8,5
Le meilleur de lca

Lambchop est de retour avec The Bible, son meilleur album depuis Mr. M. Kurt Wagner, l’homme derrière le projet, a écrit l’album pendant la pandémie mondiale de COVID-19, pendant que la société américaine était en train de s’entre-déchirer, pendant qu’il s’occupait de son père âgé à Minneapolis, loin de sa famille musicale, mais près de sa famille de sang.

La légende veut que pendant une nuit où il était incapable de dormir. Kurt Wagner était sur Instagram et il est tombé sur Andrew Broder, un ami de Minneapolis, qu’il avait rencontré à Berlin à cause de Justin Vernon (Bon Iver). Au milieu des questionnements sur la vie, sur la mort, sur la solitude et sur l’idée de spiritualité hors du carcan de la religion, le déclic s’est produit. Le prochain Lambchop verrait Wagner, Broder et Ryan Olson s’unir. C’est la première fois que Wagner s’ouvre à la possibilité de collaboration de la sorte et ça lui sourit.

Lambchop continue d’utiliser l’AutoTune comme sur ses albums précédents, mais cette fois-ci avec plus de parcimonie. Cela donne de magnifiques moments comme Dylan at the Mousetrap alors que Wagner chante de manière poignante et trouve le moyen de faire passer à travers ces effets une vulnérabilité rare. Il refait le coup, mais dans un registre différent sur Little Black Boxes. Il a enfin trouvé le moyen d’utiliser la technologie au service de sa proposition. Ces effets se fondent aisément avec les éléments électroniques qui côtoient aussi la guitare disco, les drum machines et les chœurs vocaux. Rajoutez à cela des cuivres chauds qui élèvent l’ensemble. C’est tellement efficace.

Déjà le premier simple, Police Dog Blues, nous annonçait du grandiose. Sa voix de baryton nous caressait les oreilles même si les questions qu’il porte avec lui sont lourdes. Tout se complète. Wagner est en retenue quand il chante, les cuivres incarnent la tristesse obligatoire qui suit des nouvelles comme celles de la mort de George Floyd puis la voix de Madison Hallman porte toute la colère que suscitent des événements aussi répugnants. Wagner fait côtoyer tous ces niveaux de lecture avec une intelligence musicale incroyable. C’est tout simplement à en couper le souffle.

S’il y a une chose que Lambchop fait sur The Bible, c’est toucher l’âme avec son approche aussi inusitée qu’efficace. La trame musicale magnifique d’A Minor Major Drag est à elle seule une raison de tout laisser tomber pour passer du temps avec l’auteur-compositeur-interprète. Il y a autant de magie que de retenue dans la proposition et à travers celle-ci Wagner s’insère avec sa voix trafiquée au niveau sonore, mais toujours aussi pleine d’âme.

Préparez-vous à une aventure magnifique sur The Bible. C’est une plongée dans les questionnements qui viennent avec l’âge, mais aussi une drôle d’observation sur la vulnérabilité d’autrui. Qui aurait cru que Kurt Wagner avait besoin d’être entouré pour la première fois depuis longtemps pour accepter de se livrer de la sorte ?