Critiques

Laibach

Spectre

  • Mute Records
  • 2014
  • 42 minutes
6

Spectre_Laibach5Le vétéran groupe de musique industrielle slovène, nommée Laibach, revenait à la vie la semaine dernière avec son premier album officiel, depuis Volk paru en 2006, intitulé Spectre. Laibach possède une renommée internationale (encore plus accentuée en Europe) qui pourrait se comparer à celle de Ministry. Reconnu pour ses prises de position politique ambivalentes, pour l’utilisation d’uniformes directement inspirée d’un totalitarisme gauchiste ou droitiste ainsi que pour l’influence musicale du compositeur allemand Wilhelm Richard Wagner (musicien prisé par de hauts membres de l’intelligentsia nazie à l’époque) sur leur œuvre, Laibach cultive l’ambiguïté idéologique, refusant obstinément de prendre officiellement position.

Ceci dit, voilà un Spectre dont le propos en étonnera plus d’un. Cette fois-ci, Laibach propose une conception sonore idéologiquement affirmée, anormalement située à gauche politiquement parlant, exprimant un désarroi certain quant aux obsessions consuméristes/machistes issues d’un système économique mondial de plus en plus néo-libréaliste, qui entraîne le monde dans une lente et longue spirale descendante.

Pour bien faire comprendre le message véhiculé, les Slovènes ont préconisé une approche beaucoup plus accessible qu’à l’accoutumée, amalgamant des éléments sonores provenant autant du synth-pop que de la musique industrielle. Ce Spectre est mélodiquement tout à fait à la hauteur et les atmosphères sonores préconisées servent bien le message.

Quelques exemples probants viennent appuyer nos dires: l’aspect héroïque amplifié par les sifflotements sur The Whistleblowers, les échantillonnages utilisés et la performance vocale de Mina Spiller dans Eat Liver! ainsi que l’alternance entre une voix masculine d’outre-tombe et celle d’une femme, dans la déclaration de guerre contre tous les dirigeants oppresseurs tirée Bossanova. Sur la plupart des morceaux, la charge vitriolique contre toutes les formes d’autoritarisme est sans équivoque. Encore une fois sur la percutante The Whistleblowers, on y entend sarcastiquement ceci: «We breathe as one/Living in fame, or dying in flames».

En contrepartie, voilà une formation qui roule sa bosse depuis plus de trente ans et à certaines occasions, les années accumulées au compteur se font sentir. Par exemple, on se serait bien exempté de ces synthés conservateurs et anachroniques entendus sur Koran et Americana ainsi que le petit penchant Rammstein assez inopportun évoqué sur Walk With Me, mais dans l’ensemble Laibach tire bien son épingle du jeu.

Après huit années d’absence des studios d’enregistrement, on peut affirmer sans gêne que Laibach n’a pas trop perdu la main. Ce Spectre devrait rassasier les fanatiques de la formation, malgré le côté plus intelligible de l’entreprise. En ce qui nous concerne, sans être un dévoué fervent de l’esthétique sonore préconisée par Laibach, cette sitedemo.cauction nous a agréablement surpris par sa cohérence et par son affirmation politique ne faisant aucun doute. Un effort honnête!

Ma note : 6/10

Laibach
Spectre
Mute Records
42 minutes

www.laibach.org

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