Critiques

Keith Kouna

Le voyage d’hiver

  • L-A be
  • 2014
  • 74 minutes
8,5
Le meilleur de lca

keithkounahiverKeith Kouna a connu une année 2013 du tonnerre et notre homme semble bien décidé à passer un 2014 tout aussi capoté! Pour ce faire, celui qu’on a connu comme chanteur des Goules, lançait à la fin 2013, Le voyage d’hiver. Le sympathique punk ne manque pas de couilles. Son concept? Adapter le Winterreise de Franz Schubert, rien de moins. Transposer une suite de lieds est déjà un défi de taille, mais lorsque l’on adapte une suite de lieds qui a été d’abord et avant tout composée pour accompagner les mots d’un poète allemand (Wilhelm Müller), on est carrément ailleurs.

Cela a pris un peu plus de quatre ans à Kouna pour achever le projet. Ce n’est pas faute de mots, mais plutôt de direction musicale et il a retrouvé l’inspiration avec l’arrivée de René Lussier qui a su bien encadrer Kouna. Voilà! L’excentrique parolier a accouché de cette œuvre colossale en décembre.

Musicalement, on est très loin du style préconisé par Kouna sur l’excellent Du plaisir et des bombes. On se retrouve dans un univers où le piano occupe une place centrale et où l’orchestration est intelligente et variée. Ce n’est pas révolutionnaire, mais si cela réussit à faire apprécier Schubert à un public qui n’aurait pas naturellement tendu l’oreille, ce sera mission accomplie! Kouna se permet tout de même un mélange des genres exquis et une actualisation tout à fait réussie; la partition musicale n’est ni poussiéreuse ni campée dans une époque précise. Ceci (espérons –le) devrait assurer une pérennité à ce Voyage d’hiver. Par exemple, on retrouve dans la pièce Cimetière un travail sonore particulièrement intéressant. Le mélange piano/cordes/bidouillages sonores bizarres/distorsion est franchement réussi.

Côté texte, on retrouve un Kouna habité des thèmes habituels qu’il affectionne particulièrement: sexe, drogue et alcool, auxquels s’ajoutent la solitude, la mort ainsi que des sujets sombres et profonds. Celui-ci n’a rien perdu de sa couleur singulière et à la première écoute, le fait d’entendre sur Engourdissement: «Je prends le bison par derrière/Et saute la fée des glaces» fait sursauter. Pourtant l’ensemble est conséquent et marche à merveille. Oui, Schubert peut rimer avec pervers sans problème. Kouna en fait une éloquente apologie. Sur le fleuve nous ramène sur les chemins sinueux de l’alcool alors que Romance et désirs nous transporte dans une ambiance feutrée, sexy et définitivement plus proche du club de jazz que d’une salle de concert rock.

Kouna est un artiste avec un A majuscule! Il le prouve avec aplomb et humilité. Celui-ci a préféré prendre tout le temps qu’il fallait pour arriver au résultat qu’il recherchait. Sans une once de mièvrerie, Kouna rend hommage à Schubert en l’adaptant astucieusement à sa poésie et crée un Voyage d’hiver riche et marquant.

Ma note : 8.5/10

Le voyage d’hiver
Keith Kouna
L-A be
74 minutes

keithkouna.com/

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