Julien Sagot
Valse 333
- Simone Records
- 2014
- 35 minutes
En 2012, l’ex-idéateur sonore chez Karkwa, Julien Sagot, faisait paraître une première offrande fort prisée, titrée Piano Mal, qui lorgnait vers un folk rock un peu prog et assez champ gauche; disque qu’on a fortement apprécié. Cette semaine, Sagot est de retour avec Valse 333 qui s’éloigne des sonorités organiques sitedemo.caiguées sur Piano Mal bifurquant vers un univers sonore plus empirique et plus menaçant que le précédent effort. Un gros disque!!!
Vous dire à quel point, on s’est délecté de cette Valse 333 serait un euphémisme total. ENFIN, un créateur chansonnier assumant superbement ses ascendants (Murat, Bashung, Arthur H), brouillant les pistes astucieusement (musicalement et littérairement parlant) et n’ayant aucune gêne à se balancer dans une certaine expérimentation musicale. Sagot nous convie à un périple énigmatique où l’exploration précède sur le désir de séduction du plus grand nombre. Oui, c’est un album parfois opaque, mais qui demeure relativement accessible: l’infaillible Ficelle constituant une preuve irréfutable de cette intelligibilité.
Au programme, vous y entendrez des cadences débridées de la part du percussionniste de luxe Robbie Kuster (Patrick Watson, Forêt), des chuintements grisants, des moments aériens, une basse entraînante, tout cet appareillage foisonnant magnifiquement auréolé des inflexions vocales relâchées de Sagot évoquant un amalgame singulier de Murat, Arthur H et Gainsbourg. Un disque audacieux et brillant!
Évidemment, le non-initié adepte de consensualisme pourrait trouver le voyage proposé un peu long, mais pour le mélomane aventureux/curieux, la récompense sera décuplée. Loin de nous l’idée de vous faire peur, car en toute honnêteté ce disque n’est pas si impénétrable… Ça demande un certain effort et il faut bien avouer que Sagot est une étrange anomalie dans notre petit monde musical, mais ça demeure quand même assez déchiffrable pour le mélomane qui s’en donnera la peine.
Valse 333 est un disque qui s’écoute d’un bout à l’autre sans interruption. Parmi les moments forts de cette sitedemo.cauction, on a noté l’inquiétante Avion, détenant un petit je-ne-sais-quoi de Portishead, le superbe rallentando/intermède frémissant à mi-parcours de Couleur jaune, la très Arthur H titrée Ficelle, la mélancolique/ténébreuse Les squelettes, l’acoustique Katheline (qui fait contraste avec le reste de l’album) ainsi que la conclusive Générique.
Sagot nous gratifie d’un superbe album clair-obscur, onirique, d’une certaine froideur, mais qui séduit et qui réussit à toucher le cœur irrémédiablement. Les structures chansonnières sont souvent atypiques, mais le bonhomme parvient toujours à nous ramener à un point d’ancrage mélodique ou sonore. Sur Fripper, Sagot se qualifie de «pantin obsolète» et bien, notre homme a tout faux. Il est tout simplement un créateur hors norme.
Ma note: 8/10
Julien Sagot
Valse 333
Simone Records
35 minutes
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