Jamie XX
In Waves
- Young
- 2024
- 45 minutes
De l’eau a coulé sous les ponts depuis la sortie en 2015 d‘In Colour, le dernier opus de Jamie XX. Membre du groupe d’électro britannique The XX avec Romy Madley Croft et Oliver Sim, Jamie Smith, de son vrai nom, a alterné entre carrière de groupe et projets personnels, incluant des contributions aux albums solos des autres membres de The XX (Hideous Bastard d’Oliver Sim et Mid Air de Romy) et même à la bande-son d’un ballet (Tree of Codes). En revanche, depuis quatre ans, Jamie XX s’est mis en tête de travailler sur un nouvel effort personnel, un produit artistique musical pouvant capturer la joie comme l’introspection, les embûches et les plaisirs, telles des vagues parcourant la vie. Maintenant, presque une décennie plus tard, Smith livre enfin son second opus, In Waves. De par sa pochette, l’auditeur est en droit de se demander si nous ne sommes pas face à l’antithèse de son prédécesseur, les lignes droites ayant été remplacées par des ondulations et la couleur, par le noir et le blanc. Pourtant, In Waves est la suite logique, légitime et surtout, honorable, d’In Colour.
Sous le mot d’ordre de l’hédonisme, la joie de vivre, et la sueur des planchers de danse, In Waves se veut rassembleur, tel un hymne prêt à être entonné par les fêtards. La première piste, Wanna, donne le coup d’envoi, comme une porte qui s’ouvre vers une boîte de nuit accueillante. S’enchaînent ensuite 11 autres pistes engageantes et pleines de vitalités et de joie de vivre : des pianos et trompettes entêtantes de Baddy On The Floor aux chœurs d’enfants de la magnifique All You Children. Entre échantillons vocaux et rythmiques rapides, Jamie XX emprunte à la musique britannique, du UK garage de Treat Each Other Right en passant par les basses puissantes de Still Summer (mon casque d’écouteurs en a tremblé). D’autres influences drum & bass peuvent également être entendues sur Breather, piste la plus aventureuse de l’album, résonnant dans nos oreilles comme un mantra et une source d’espoir, menant ensuite vers une seconde moitié cathartique.
Sur In Waves, il n’y a aucun répit, il n’y a que de légères variations de BPM. Pourtant, l’auditeur est transporté dans un univers ou rythme et émotion se côtoie, mélange que Jamie XX avait maîtrisé sur des morceaux comme Loud Places (véritable joyau électro de la décennie 2010). Sur ce nouvel album, même si ce côté mélancolique est moins présent, In Waves ne cesse de nous faire sourire avec ses sonorités ensoleillées, sourire qui demeure sur nos lèvres jusqu’au dernier morceau, Falling Together, qui conclut adéquatement ces presque 45 minutes ininterrompues de musique effrénée, le tout enveloppé de paroles simples, mais universelles, qui nous touchent droit au cœur.
Au-delà des nombreux échantillons vocaux saccadés et altérés, le DJ anglais n’hésite pas à inviter divers interprètes pour agrémenter les morceaux. En effet, l’album se veut un porte-étendard des voix de la musique house, voix colorées et pleines de personnalités, à l’instar de Kelsey Lu, qui amène un charme sensuel à la piste Dafodil qui, quoiqu’un peu longue, sait tout de même garder le public en haleine. De plus, afin de rendre la genèse du projet cohérente et complète, Jamie Smith rend également hommage aux pionniers et icônes LGBTQ+ de la musique house et club en général, notamment Honey Dijon, artiste et DJ transgenre, ainsi que Robyn (artiste suédoise derrière l’hymne Dancing On My Own), celle-ci offrant des élans de la scène ballroom sur Life. Cette euphorie, c’est ce que nous retrouvons tout au long de In Waves. C’est aussi celle que j’ai pu retrouver dans le fantastique RENAISSANCE, ce fameux album de Beyoncé nous appelant à nous laisser aller sur le plancher de danse dans un monde post-pandémie. In Waves, quoique moins avant-gardiste, maintient une ligne directrice tout au long de ces 12 chansons, nous invitant à oublier nos soucis le temps d’un album. Cette année, dans un registre d’album fait pour se déhancher, nous avons également eu l’immanquable phénomène BRAT de Charli XCX. Décidément, la scène britannique s’est donné pour mission en 2024 de nous faire danser. Pari réussi!