Critiques

Chubby and the Gang

The Mutt’s Nuts

  • Partisan Records
  • 2021
  • 43 minutes
7,5

C’est en janvier 2020, juste avant l’irruption de la pandémie mondiale, que la formation punk londonienne Chubby and the Gang lançait son premier long format : le frénétique Speed Kills. Cette mixture sans compromis de punk hardcore, de hard rock, de pub rock, de doo wop et de blues, remémorant autant Motörhead que The Damned, a conquis l’auteur de ces lignes. Speed Kills est un doigt d’honneur sonore qui pourfend le conservatisme économique et social, mais qui critique aussi une certaine gauche pour qui la remise en question est difficilement envisageable et qui perçoit la discussion animée comme une forme d’agression…

Mené par Charlie Manning-Walker, alias Chubby, le quintette est complété par Tom « Razor » Hardwick, Meg Brooks Mill, Ethan Stahl et Joe McMahon. Il est important de mentionner que Manning-Walker travaille toujours à temps complet comme électricien. Tous les autres membres du groupe doivent également subvenir à leurs besoins en bossant dans des « real jobs ». La portée revendicatrice des textes du parolier n’est donc pas un leurre embourgeoisé.

Manning-Walker expulse sa colère avec sincérité sur les droits bafoués des travailleurs, les inégalités sociales grandissantes, la brutalité policière et la boboïsation de certains quartiers de la capitale anglaise. Dans Coming Up Tough, il attaque les politiques de réhabilitation des jeunes détenus prônées depuis toujours par le gouvernement britannique. « Cette chanson parle d’un membre de ma famille qui a fini par aller en prison à un très jeune âge. Il y a passé près de 20 ans. Où est la justice là-dedans ? Il n’y a eu aucune tentative de rééducation réelle pour lui, aucune empathie, juste une cage à oublier », déclare-t-il dans le communiqué de presse transmis par la maison de disques (traduction libre).

La semaine dernière, « The Gang » nous proposait un deuxième album intitulé The Mutt’s Nuts. Pour les admirateurs de Speed Kills, ce nouvel album ne contient pratiquement aucune surprise sonore, à une seule différence : l’approche vocale de Manning-Walker est plus rauque et colérique que sur le précédent effort. La structure narrative est également la même. La première partie de l’album se conclut avec Take Me Home to London (clin d’oeil à I’ll Be Your Mirror du Velvet); une complainte remémorant également l’œuvre du troubadour gauchiste Billy Bragg. I Hate the Radio conclut la deuxième partie en mode « pub rock ».

Comme toujours, la formation est au sommet de sa forme lorsque la pédale est au plancher. Des morceaux effrénés comme la pièce-titre, It’s Me Who’ll Pay, Beat That Drum, Pressure, Overachiever et Someone’s Gunna Die sont du Chubby and the Gang pur jus. Le groupe tente quelques incursions dans le garage rock aux accents blues; White Rags et Lightning Don’t Strike Twice, en tête de liste. On salue bien bas l’hommage aux légendaires Ramones dans le refrain de Getting Beat Again (Eppu Normaali).

Sans être aussi grisant que Speed Kills, The Mutt’s Nuts s’inscrit encore une fois dans la tradition punk prolétaire britannique qui a connu son heure de gloire à la fin des années 70. Chubby and the Gang donne un second souffle à ce punk rock inactuel. En ce moment, le contexte socioéconomique prévalant en Angleterre permet au groupe d’être crédible et pertinent, mais pour combien de temps encore ?