Critiques

Bon Enfant

Diorama

  • Duprince
  • 2021
  • 42 minutes
7,5

En 2019, quand l’album homonyme de la formation Bon Enfant a vu le jour, plusieurs ont été agréablement surpris par la pertinence de ce pop-rock à l’occasion cadencé, mais résolument québécois. Bon Enfant assume de manière ingénieuse sa québécitude.

Mené par Daphné Brissette (Canailles) et Guillaume Chiasson (Ponctuation), le quintette est complété par Étienne Côté (Lumière, Canailles), Mélissa Fortin (Canailles) et Alex Burger. Fait à noter, le long format éponyme a remporté l’album rock de l’année au GAMIQ 2020, ex aequo avec l’excellent Lighter Fluid des Deuxluxes. Si la gestation de ce premier effort a pu bénéficier de cinq bonnes années de réflexions et de retouches avant d’être enregistrée, le court laps de temps entre la sortie de ce nouvel album intitulé Diorama et celui susmentionné impose naturellement une légère contrainte créative.

Réalisé par l’incontournable Emmanuel Éthier, Diorama poursuit sensiblement dans la même veine que l’homonyme, à la différence que le groupe emprunte une tangente fortement inspirée par le pop-rock des années 80 plutôt que celui des années 70. On y décèle des influences de hard rock (Astronaute amateur), de glam rock et de folk pastoral (Vent doux).

À travers cet éclectisme musical, c’est la voix de Daphné Brissette qui se distingue significativement de l’ensemble. Cette chanteuse de très grand talent interprète ses chansons avec une sincérité évoquant celle de Martha Wainwright et une fougue remémorant notre Louise Forestier nationale. Sur ce nouvel album, la performance vocale de Brissette est tout simplement irréprochable.

Sur Bon Enfant, la formation avait collaboré avec Keith Kouna pour l’écriture des textes. Cette fois-ci, c’est vers Stéphane Lafleur (Avec pas d’casque) que le tandem Brissette/Chiasson s’est tourné. Un excellent choix, il va sans dire. Dans Astronaute amateur, Brissette rend vraisemblablement un hommage senti à son partenaire musical avec qui elle semble avoir développé une extraordinaire complicité :

Y’en a pas des comme toi mon allié cosmique

La magie qui opère nous propulse dans les airs

Ta présence me rassure, pas envie d’être ailleurs

C’est une science exacte d’astronaute amateur

– Astronaute amateur

Dans Ciel Bleu — pièce qui remémore le War on Drugs de l’album Lost in the Dream —, Brissette chante de manière émouvante les excès de l’amour passionnel :

On sait plus quoi faire

De nos écarts de conduite

On goûte aux effets secondaires

On a le cœur qui bat vite

– Ciel bleu

En mode hypnotique « contrôlé », Diorama est tout simplement excellent. Dans la pièce-titre, le moment instrumental, magnifiquement psychédélique, est superbe. Pâte à biscuit est un véritable pourvoyeur de frissons. Et ce n’est pas étranger à cette mixture raffinée de claviers aériens, de larsens de guitare et ce solo d’une justesse exemplaire. La conclusion explosive dans L’amour à sens unique est du grand art rock. Coup de chapeau à l’intermède Triangle qui fait penser à l’œuvre de la compositrice Wendy Carlos, la génitrice de la trame sonore d’Orange Mécanique, film culte du cinéaste Stanley Kubrick. Diorama se conclut avec deux pièces aux accents folk : Grandiose et Vent doux.

Le groupe est un peu moins intéressant lorsqu’il s’aventure en territoire dansant. Dans Chagrin d’amour, le clin d’œil un peu facile au succès Kiss de Prince Rogers Nelson, alias Prince, et le petit penchant disco entendu dans Porcelaine a laissé l’auteur de ces lignes de marbre.

Qu’à cela ne tienne, Bon Enfant nous présente un deuxième album réussi. Rares sont les groupes en mesure de concevoir un pop-rock distinctif et crédible. Cette formation mériterait d’envahir les ondes de nos radios commerciales. On dit que l’espoir fait vivre…

Inscription à l’infolettre

Ne manquez pas les dernières nouvelles!

Abonnez-vous à l’infolettre du Canal Auditif pour tout savoir de l’actualité musicale, découvrir vos nouveaux albums préférés et revivre les concerts de la veille.