Critiques

Best Coast

Always Tomorrow

  • Concord Records
  • 2020
  • 39 minutes
6

Pour moi, la musique de Best Coast a toujours rimé avec les souvenirs d’un voyage en Californie, en voiture sur la route 1 entre Big Sur et Santa Monica. Il y a quelque chose de réconfortant à la musique du duo qui fait qu’on y revient sans cesse, même si la formule ne s’est pas renouvelée en dix ans. Et voilà qu’arrive Always Tomorrow, qui fait un peu de neuf avec du vieux sans rien révolutionner non plus.

D’une certaine façon, le duo formé de la chanteuse Bethany Cosentino et du multi-instrumentiste Bobb Bruno a toujours été un peu prisonnier de son premier album, l’excellent Crazy for You, lancé en 2010. Avec son “surf garage” combinant la force mélodique des Beach Boys, l’énergie du rock alternatif des années 90 et une pop bonbon à la Katy Perry, Best Coast a créé un son si distinctif qu’il en est devenu une recette. Certes, California Nights (2015) marquait un retour intéressant après le plutôt fade The Only Place (2012) mais au final, on pourrait réarranger toutes les tounes de Best Coast au hasard qu’on obtiendrait un album à peu près cohérent.

Always Tomorrow nous arrive donc après une absence de cinq ans de la part du duo (excluant l’album pour enfants Best Kids, paru en 2018). N’empêche, ce quatrième opus donne l’impression d’un groupe qui revient de loin. Depuis, Bethany Cosentino a confronté ses démons et a arrêté de boire, tel qu’elle l’a confié à Entertainment Weekly : « Les gens me demandent quels sont mes moments préférés de la décennie 2010, mais je n’en ai aucune idée. Je n’étais pas là la plupart du temps ». Elle s’est également imposée comme une des voix les plus importantes sur les médias sociaux pour dénoncer le sexisme et les abus sexuels dans l’industrie musicale.

Mais Cosentino a aussi été confrontée au syndrome de la page blanche. Incapable de s’atteler à l’écriture de nouvelles chansons, elle a appelé à la rescousse son complice Bruno qui lui a envoyé des pistes instrumentales sur lesquelles il travaillait dans le but de l’aider à retrouver l’inspiration. Le thème du doute est d’ailleurs omniprésent sur Always Tomorrow. Cosentino fait même preuve d’une certaine forme d’autocritique. Ainsi, sur Wreckage, elle reconnaît sa tendance à toujours écrire un peu la même chanson, comme le lui ont souvent reproché les critiques (même qu’elle se cite elle-même sur Graceless Kids, qui reprend mot pour mot une ligne issue de la chanson How They Want Me to Be, parue sur l’album The Only Place). Elle aborde aussi de front ses problèmes de consommation sur Everything Has Changed.

Les textes de Best Coast ont souvent péché par excès de simplicité, mais on se réjouit ici de voir le groupe aborder d’autres problématiques que les amours adolescents ou la jalousie entre copains. Cela dit, ce nouvel album souffre d’un manque d’originalité sur le plan des musiques. Évidemment, on ne s’attend pas du groupe californien qu’il nous étonne par de nouvelles structures ou des influences inattendues, mais certaines chansons sonnent comme des pastiches. Everything Has Changed évoque le fameux I Love Rock ‘n’ Roll de Joan Jett, tandis que Graceless Kids rappelle Pat Benatar. Il y a aussi du Green Day sur une pièce comme Master of My Own Mind.

Malgré un son un peu trop rock FM par moments, la force de l’album réside dans ses mélodies. Le refrain de Rollercoaster est particulièrement addictif, sur fond de psych-rock légèrement acidulé, tandis que Seeing Red donne envie de chanter à tue-tête. Étonnamment, c’est la ballade Used to Be qui frappe le plus fort en fin d’album, grâce à la voix un peu grinçante de Cosentino et un joli motif de guitare.

Bref, Always Tomorrow expose à la fois les qualités et les défauts de Best Coast. La formule reste encore efficace, mais comme toutes les formules, elle a ses limites. Pas assez pour bouder notre plaisir, mais il faut modérer nos attentes…

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