Critiques

Arcade Fire

Pink Elephant

  • Columbia Records
  • 2025
  • 42 minutes
6

Les braises brûlent encore à la suite de l’incendie du scandale qui est tombé sur Arcade Fire en 2022. La fumée a plongé le groupe dans un silence de 2 ans, duquel ils sont sortis pour les 20 ans de Funeral. C’est plutôt ironique, quand même. Ce n’est pas un phœnix, mais un Pink Elephant qui renaît des cendres, qui semblent encore très chaudes pour faire un retour aussi puissant.

En tant que fan finie, brûlée par les allégations, j’ai commencé l’écoute avec précaution. La première chanson du nouvel album d’Arcade Fire, Pink Elephant, s’intitule Open Your Heart or Die Trying, une version de l’adage popularisé par 50 cent qui appelle violemment à l’empathie . Décollage en ambiance stellaire créé par les sirènes de la fin du monde qui s’harmonisent — de quoi tenter la dédramatisation ? Commencer en douceur pour mieux avaler le scandale. L’album est bien construit, un brin plus grunge, colmaté avec des pièces transitoires qui donnent le caractère homogène recherché dans les deux derniers opus WE et Everything Now, les mal-aimés des sept albums du band. Cependant, la force d’Arcade Fire était de faire grand avec peu. Dans Pink Elephant, comme avec WE, c’est trop peu. Une négligence justifiée par un succès assuré, qui crée un vide qu’on retrouve particulièrement dans Years of the Snake, un des extraits dévoilés avant la sortie du LP. Un genre de berceuse qui semble avoir stagné en version brouillon. La voix de Régine sauve la chanson et la rend finalement charmante. Je dois dire que tout ce qu’elle fait est piscine à 80 en temps de canicule. Toujours adéquate.

En tant que fan ultime retraitée de type « je braille les 70 % d’eau de mon corps sur le plancher du Centre Bell, les yeux rivés sur Régine qui danse en déesse sur Mountains Beyond Mountains », j’ai maintenant les yeux rivés sur le Pink Elephant in the room. J’ai traversé une série de malaises depuis leur retour tout en rose. Pour promouvoir leur album, ils ont créé une plateforme rose dragée intitulée Trust, sur laquelle le groupe publie du contenu extraexclusif. Les adeptes peuvent aussi publier ce qu’ils veulent. On y voit des archives de fans de partout à travers le monde, des égoportraits préspectacle arborant le #CircleOfTrust, même des reçus de commande de marchandise du groupe montrant la grande fierté de faire partie du Circle of Trust. En accédant au fan club, j’avais l’impression de garantir au groupe ma confiance et mon silence face à la polémique sexuelle de Win Butler. Dans la chanson du même nom Circle Of Trust, c’est inévitable de faire le parallèle avec les histoires sorties sur Pitchfork. Chanson grungy-alternative aux couleurs Bowie :

The Archangel Michael
Is blowing up your phone
He wants to know where you are
And when you’re coming home”
Circle of Trust

C’est explicite.

Et faut parler du rose. Tout ce qui vient avec l’idée d’un monde rose naïf : la sécurité, le plaisir, l’amour fou, la passion. On n’oublie pas que choisir de regarder le quotidien avec des lunettes roses, c’est choisir le déni, choisir le silence. L’éléphant rose semble être une créature du confort : ils ont choisi le chemin du « Better safe than sorry ».

L’album termine sur Stuck in My Head, avec un rock précis et Win qui balance tout : « I quit this job, I clean up this bedroom, this head, this heart. » On balance tout par la fenêtre et on recommence. La thématique de l’album est bien exploitée. La mue du serpent frappe directement dans le chest, tout bouscule pour faire peau neuve. De célébrer un album avec en tête d’affiche un leader aux comportements de vipère, ça glace le sang à la température reptile.

Win l’a très bien dit dans Years of the Snake : « The way it all changed makes me wanna cry. »

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