Chroniques

La sagesse d’une icône ébène : une entrevue avec Angélique Kidjo

La charismatique artiste franco-béninoise s’en vient à Montréal pour lancer avec classe le Festival international des Nuits d’Afrique.

Un seul concert, le 12 juillet, pour embraser le MTELUS de sa voix puissante à nulle autre pareille qui résonne depuis quatre décennies à tous les points cardinaux. Elle se confie sur sa perception du star-system actuel, sa révélation pour le Moyen-Orient, la Reine de Saba et sa poésie tout en sagesse, et les premiers pas de sa fille dans l’arène musicale.

Constellation du succès

En juillet, l’artiste sans âge soufflera 62 bougies. Pas l’ombre d’une marque de fatigue chez cette surhumaine artiste ayant plus que mérité sa place parmi les vedettes. Hautement estimée par les Grammy Awards qui lui ont décerné pas moins de cinq prix, l’artiste en louange l’histoire, une organisation fondée par une femme, unique dans le panorama de l’industrie. Chouchoutée par la BBC, Time Magazine, Paris-Match, The Guardian, la chanteuse fait l’unanimité avec panache et naturel. L’interprète de We Are One, Wombo Lombo et son éternel Africa envoûte et attire un public hétéroclite. Son récent duo avec Yemi Alade sur Shekere démontre sa parfaite contemporanéité et son africanité universelle. Face à un tel raz-de-marée de succès, Angélique Kidjo garde la tête sur les épaules et assume sa pleine notoriété, sa consécration de « première femme dans la liste des quarante célébrités les plus importantes d’Afrique » décernée par Forbes Magazine. Après 40 ans de vocation artistique, elle a charmé la planète entière. « Le star-system a changé avec l’avènement des technologies. Je ne vois pas comment ce système peut permettre à un jeune de vivre de son art, car seuls ceux qui se hissent en haut y gagnent ! Les plateformes limitent cet élan, et je crois que des législations doivent protéger la propriété intellectuelle. »

Quel est donc son secret de longévité dans le circuit ? « J’ai le sentiment d’avoir traversé un long chemin, pavé de bons et de mauvais jours… Une destinée, un privilège de vivre de ma passion et de faire ce métier que j’aime avec une intégrité morale, artistique et humaine. Vivre exige du courage et des compromis, aucune vie n’est facile, mais heureusement qu’il y a mon partenaire de vie sur lequel je peux compter, depuis 36 ans… »

Aligner des ponts dans un monde divisé

Jamais à bout d’audace et d’innovation, Angélique Kidjo sait défricher de nouveaux terreaux de collaboration. Son dernier album Queen of Sheba réalisé avec Ibrahim Maalouf est l’une de ces matérialisations créatives. Une histoire d’admiration réciproque qui les mène d’un concert à New York à un projet en studio. Il leur faut trouver une histoire à raconter. Un lien entre l’Afrique de Kidjo et le Moyen-Orient de Maalouf. La figure historique de la Reine de Saba, racontée dans tous les livres de religion et au-delà, devient leur pierre d’assise. Avec son mari, Angélique Kidjo procède à des recherches, découvrant une pléiade de poèmes. Autant de thèmes sur lesquels naîtront des chansons. Ce projet conçu a priori pour le live aboutira à un album. Un boulot incroyable pour l’autrice-compositrice qui adapte des poèmes de la Reine du yoruba au français.  « J’ai élucidé les énigmes de cette femme qui a pu apprendre à diriger son peuple grâce à la sagesse. L’une des énigmes interroge de la sorte : quelle est la chose qui n’a pas de chair, mais qui est vivante ? La réponse : un œuf devenant poulet. Qu’est-ce qui est doux et amer à la fois ? Les larmes. Pour moi, ces énigmes ont leur place dans notre monde de plus en plus divisé où la sagesse s’effrite… », lance philosophiquement l’artiste qui cumule à son palmarès des duos avec Sting, Alicia Keys et tant d’autres.

La fille d’Angélique Kidjo, Naïma, suit les pas bénis de sa mère. Brillante, la jeune femme prend ses propres décisions et évolue en parallèle dans les hautes sphères universitaires. Fière, la vedette lui laisse la pleine latitude et évite de la conseiller, sauf peut-être par ce credo personnel : il faut commettre des erreurs, on ne peut se protéger des échecs et savoir se relever.

Prête à conquérir le public des Nuits d’Afrique et la métropole tout entière, Angélique Kidjo réserve un bain d’amusement et de danse assuré ! Entourée de ses prodigieux musiciens du moment, la chanteuse puisera dans le registre de ses trois précédents albums pour égayer le premier jour du festival…

Angélique Kidjo, le 12 juillet au MTelus

Crédit photo: Fabrice Mabillot

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