Âgée de 36 ans seulement, on peut considérer l’auteure-compositrice-interprète folk gothique Marissa Nadler comme une pionnière de ce genre musical. En 2014, elle avait déjà lancé son sixième album studio intitulé July; une autre réussite dans un corpus qui ne contient aucun faux pas. Mais c’est à la sortie de Strangers (2016) qu’elle fut révélée à un nouveau public; un album plus ambitieux, superbement mixé et détenant des arrangements étoffés, offrant à l’auditeur une amplitude sonore bonifiée.

La semaine dernière, l’artiste était de retour avec un nouvel album : For My Crimes. Les chansons de cette production ont pour la plupart été composées au cours de la tournée Strangers… et en tournée, il se passe assez de « choses bizarres » pour que l’inspiration frappe de plein fouet !

Réalisée à quatre mains par Justin Raisen et Lawrence Rothman, l’intention créative de Marissa Nadler était de concevoir un véritable album de « slow music ». Et la dame a reçu l’appui de deux grandes chansonnières qui en connaissent un bon petit bout en matière de « slow music » : Angel Olsen et Sharon Van Etten. Olsen harmonise sa voix à celle de Nadler sur la pièce titre et Van Etten joue le même rôle sur deux chansons, dont la sublime Blue Vapor.

Si Strangers étonnait par l’ampleur de ses arrangements, For My Crimes surprend par son économie sonore; un album à forte consonance folk sur lequel on note une absence quasi totale d’instruments percussifs. Si le côté mélancolique et obscur constitue toujours la marque de commerce ultime de l’artiste, l’émotion pure, celle qui bouleverse au point de vous arracher une larme, est affaiblie par le fort penchant dépouillé de ce nouvel album.

Précision. Avec Marissa Nadler, impossible de se tromper. Cette fille possède un talent supérieur et son éloquente feuille de route parle d’elle-même. Cela dit, on considère ce nouvel album comme un léger pas de côté. On insiste. Ce n’est pas un recul, mais après nous avoir présenté une production aussi dramatique et aboutie que Strangers, de se retrouver devant des chansons pratiquement dénudées d’artifices a de quoi désarçonner… même le plus ardent défenseur de Marissa Nadler.

Qu’à cela ne tienne, For My Crimes est un disque nettement au-dessus de la moyenne. En plus de Blue Vapor, on a apprécié Lover Release Me : un ultimatum lancé par l’amoureuse Nadler à un ex-prétendant. L’inclinaison « menaçante » dans Interlocking et l’interprétation sentie de la chanteuse dans All Out of Catastrophes et Flamethrower émeut.

Encore une fois, c’est une très belle offrande de la part de cette faiseuse de chansons émérite, mais on la préfère en mode plus « orchestral ».