POP Montréal 2017 : Soirée du 15 septembre #2
Pour cette troisième soirée de POP, j’avais décidé de la passer en compagnie de Joni Void et William Basinsky!
Joni Void
Joni Void faisait entendre hier soir de beaux montages sonores évolutifs à la Fédération Ukrainienne. Lors de la première moitié du concert, la musique et les vidéos se complétaient dans un contrepoint intéressant et bien balancé. Le projecteur était surmonté d’un verre amovible qui diffusait l’image quand il était mis devant l’objectif, donnant une dimension explicite audit contrepoint. Au début, la musique suivait la vidéo, auquel cas les deux arts fonctionnaient en parallèle, et plus tard nous était montrée l’arrestation d’un homme noir par deux policiers – pendant quoi la musique était beaucoup moins présente. Entre-temps et par la suite, Void utilisait le verre pour mettre un accent évident sur la musique.
Il y avait une belle synchronicité — parfois manuelle, parfois préprogrammée — entre la musique et la vidéo quand c’était de mise, et une belle recherche plastique et compositionnelle. Une des parties de la première moitié du concert était composée avec une sirène d’ambulance en quarte qui baissait d’une tierce à cause de l’effet Doppler, et il utilisait la chose de façon très intéressante. La section musicale qui suivait le vidéo de l’arrestation mentionnée plus haut comprenait une longue citation directe de bout.that de Clipping., choix éclairé par le sens des paroles citées…
La deuxième partie du spectacle qui était tirée de son dernier album, était assez différente, laissant la musique prendre toute la place avec une pièce très lente avec comme seuls matériaux deux boucles – une de piano et l’autre de voix. La pièce a eu un peu de mal à partir pour moi. Je la trouvais un peu stagnante au départ, mais son évolution et surtout la transition graduelle d’un son à l’autre lui a redonné de la pertinence jusqu’à la fin.
William Basinski
La barre était donc assez haute pour le très ambiant et pourtant étincelant William Basinski, qui a donné un concert à la hauteur de son ambiance — dont une pièce « funérailles » dédiée à David Bowie. Sur ce point on le croit sur parole, on se doutait que les échantillons utilisés étaient tirés de l’œuvre du défunt, mais on était loin de les reconnaître. Seul un fin connaisseur de son travail aurait pu discerner la provenance des quelques citations utilisées tellement elles étaient dénaturalisées par le compositeur. Indépendamment de tout cela, la pièce était bien exécutée, très peu et très lentement développée au fil d’une grosse demi-heure. Il manquait peut-être un peu de métamorphose au niveau du spectre harmonique ou du volume, mais dans un tel style il est assez délicat de traiter de ce genre de détails.
Basinski était épaulé par ses deux reel-to-reel, ajoutant à son esthétique rétro (veston à paillettes, lunettes de soleil, souliers gloss et longue queue de cheval). Son veston reflétait un éclairage intéressant, mais d’une nécessité discutable, considérant que la majorité de la salle n’ouvrait ses yeux que quand il y avait du rythme dans la musique – jamais. Un des points forts du spectacle — et c’est caractéristique du style — est la fin des pièces. Le silence qui suit une telle densité sonore est souvent aussi cathartique que la pièce elle-même. Somme toute, c’était un assez bon concert, mais le clou de ma soirée reste l’acte précédent.
Je tiens à prendre ces quelques lignes pour féliciter l’impeccable travail de sonorisation de la soirée. Il est tristement important de reconnaître le savoir-faire d’un technicien qui sait trouver une aussi bonne balance spectrale (qui est, évidemment, due aux artistes également) et qui ne ressent pas le besoin de systématiquement pousser le volume au seuil de la douleur. Ces savants Hommes sont déplorablement en voie de disparition.