Critiques

David Bowie

Blackstar

  • Columbia Records / RCA Records
  • 2016
  • 42 minutes
9,5
Le meilleur de lca

Ce texte a été écrit le soir du 7 janvier. Il apparaît ici dans sa version intégrale, mais il y a malheureusement un ajout écrit le 11 janvier.

C’est avec une joie non contenue que j’ai déballé mon premier album de 2016, il y a quelques heures. On va se le dire, un album de David Bowie, à ce stade-ci de sa carrière, c’est toujours un événement. Bien sûr, on est moins surpris qu’en 2013, alors qu’il a mis fin à 10 ans de silence sans crier gare avec The Next Day. Par contre, et même si c’est loin d’être une rature, on demeurait en territoire soft rock traditionnel avec ce premier Bowie en une décennie. Si Blackstar avait été l’album du grand retour, la surprise aurait été totale.

C’est qu’après avoir lancé son Next Day, le Thin White Duke s’est ramassé à une table du 55 Bar dans le West Village de New York. C’est là qu’il a vu le quartet mené par le saxophoniste Donny McCaslin. Plus tard, des courriels surréalistes se sont échangés entre les deux musiciens et la pièce Sue (Or In A Season Of Crime), ajoutée à la dernière minute à la compilation Nothing Has Changed de 2014, a été enregistrée avec McCaslin et son batteur Mark Guiliana. De fil en aiguille, des liens se sont créés et le quartet au complet s’est retrouvé à être le band de Bowie sur les 42 minutes de l’un des albums les plus insaisissables de ce monument de monsieur.

Le vidéoclip de la chanson titre de 10 minutes représente bien l’album. Bowie est un prophète aveugle qui se promène parmi des crucifiés et on ne comprend pas tant le propos de l’oeuvre que sa couleur. Bref, son ancien collaborateur David Lynch doit être pas mal fier de son ami. C’est à lui que j’ai pensé tout au long l’écoute de ces sept chansons trippy-atmosphérico-jungle-acid-jazz indéfinissables. Un peu comme à l’époque de Outside (et du Lost Highway de Lynch), on sent bien des choses et on comprend qu’il y a des protagonistes récurrents dans l’histoire/le rêve qui nous est raconté, mais chaque mot et chaque note donnent naissance à mille interprétations différentes. Ouep. C’est un bon film de David Lynch en musique ce disque-là, finalement.

Ce ne sont là que quelques premières impressions couchées sur papier et probablement que cette critique serait fort différente si j’ajoutais une vingtaine d’écoutes au compteur. Une seule chose est sûre, je serai autant captivé par l’album quand je le connaîtrai par coeur. À presque 70 ans et avec 26 albums au compteur, David Bowie est encore de retour en force et sa capacité d’innover est toujours bien présente. Personne ne réussirait à me faire avaler autant de saxophone…Et pourtant!!

Évidemment, il faut avoir l’esprit ouvert. C’est un disque qui va diviser les fans. Ce n’est pas un trip revival qui allumera les fans du Bowie glam des seventies. Loin de là. En revanche, il y a énormément de viande autour de l’os pour un album aussi concis et le mélomane acharné sera vivement récompensé. On n’aura probablement plus jamais l’occasion de le voir en spectacle, mais si le bonhomme s’enferme encore pour faire un travail d’orfèvre et nous livrer des galettes aussi flippantes, je dis oui! L’année commence très bien.

Ajout:

J’ai appris la mort de David Bowie vers 3h30 du matin et j’ai eu pas mal de difficulté à ne pas tout lire ce qui s’est écrit sur le sujet depuis, et sur toutes les plateformes. Je me suis trouvé con de ne pas avoir pensé qu’il aurait pu écrire de façon moins cryptique pour une fois. Je pense que j’ai eu de la difficulté à assimiler que Bowie puisse vraiment mourir, finalement. Je pense aussi qu’à ce point-ci, une critique de l’album ne vaut absolument plus rien. Que dalle. J’ai vécu le cancer de très près et j’ai trouvé ça incroyable qu’il ait pu trouver l’énergie pour mener cet immense projet à terme. Que ce soit bon ou mauvais importe peu désormais. Pensez-y. De mon vivant, je n’ai jamais vu une mort d’artiste aussi digne, aussi théâtrale et aussi belle, finalement. David Bowie est mort comme il a vécu. Comme dans un film.

Mes respects, monsieur!

Ma note:

Oubliez ça!

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